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Après l’évacuation du squat Béraud à St-Etienne

L’objectif est bien d’expulser le maximum de Rroms

Mais 45 enfants ont pris le chemin de l’école...

mercredi 5 septembre 2007

Pour prendre contact avec le réseau de solidarité avec les familles Rroms, on peut s’adresser à :
Adeline Combat : 06 83 31 94 78
Anne-Sarah Lecardiet : 06 82 31 24 86
Marcel Gaillard : 06 31 25 85 51
Roger et Paulette Millet : 04 77 21 74 56
Marie-Pierre Vincent : 06 87 50 84 42
Anna Pidoux : 04 77 46 49 76
Marcel Jozeau : 06 08 37 61 71
Joël Dupuis : 06 84 79 56 86
Josiane Reymond : 06 98 95 91 37
Eugène Garde : 04 77 55 00 98
Paul Roux : 06 09 04 69 98
Georges Gunther : 06 83 28 82 17

Cassandra Herziog, 10 ans, au collège Jean Dasté , en cette année ©mpv

L’expulsion du squat Béraud le 8 août...

Mercredi 8 août, à 6 heures du matin, a commencé l’expulsion du squat des familles Rroms de la rue Béraud à St-Etienne. Ordonné par la Préfecture, à la demande
de la mairie de St-Etienne et d’EDF. A 10h30, l’opération était terminée, pour ce qui est de l’expulsion du moins...
Enorme déploiement de gendarmes (2 cars, 4 fourgonnettes sur la rue Beraud) et de policiers de la police nationale (nombreux véhicules de police rue de la Veue,
côté parking, par où la sortie des familles a été faite). Au total sans doute environ 150 policiers et gendarmes.
Présence sur place de responsables de la Préfecture et de la Police nationale. Par contre absence totale de la mairie, courageusement réunie en “cellule de crise”,
selon certaines informations, en mairie, à quelques kilomètres de là...
Pas de brutalité vis à vis des familles cette fois, rien à voir avec l’évacuation du terrain du Clapier et le saccage des caravanes, il y a un an, le 25 juillet 2006. On peut
penser qu’il y a des choses qui ne sont plus possibles, à cause du travail et de la force du réseau de solidarité dans la ville. Reste qu’expulser des familles et
plusieurs dizaines d’enfants à 6 heures du matin, c’est quelque chose de profondément violent.
Après avoir investi le bâtiment, les policiers ont donné deux heures aux familles pour prendre quelques affaires personnelles. Auparavant vérification d’identité pour
tout le monde. Au moins pour certains, passage dans une camionnette équipée d’ordinateur, etc... Mais aussi du filmage vidéo et des photos. Bref, on complète le
fichage, on s’en re-servira bientôt... Par contre, pas d’arrestation ni de conduite immédiate en centre de rétention.
Plusieurs militant-e-s des associations du réseau de solidarité étaient présent-e-s, pour être témoins de ce qui s’est passé, et aussi pour aider à emmener des
personnes et des affaires.
La direction de la police a accepté qu’un camion demandé à la mairie vienne vers 10h30 chercher quelques affaires supplémentaires. Une trentaine de . matelas ont
pu être emmenés à Montplaisir. Mais bien entendu les familles n’ont pu emmener avec elles qu’une infime partie de ce qu’elles avaient rassemblé au fil des mois
pour vivre au squat Béraud.
Le murage des fenêtres et portes a immédiatement été commencé.
Le jeudi de la semaine suivante, le réseau de solidarité a quand même pu récupérer dans les locaux de Béraud une partie des équipements et des matériels
abandonnés par les familles, qui ont été amenés au squat de Montplaisir avec une camionnette mise à disposition par EDF.

Car les familles Rroms de Béraud ont été invitées quasi officiellement à s’installer dans la deuxième partie de l’école de Montplaisir, à côté des familles Rroms déjà
installées dans l’autre partie des locaux. La mairie procède par étape, et c’est même elle qui a fait passer les clés (pour cette deuxième installation). Visiblement, la
priorité était de démanteler le squat Beraud et l’objectif de faire de Montplaisir un centre de regroupement des Rroms de la ville. On a même vu ces jours-là des
policiers municipaux “récupérer” une famille Rrom de 9 personnes (2 adultes, 7 enfants) dans un autre lieu de la ville et la conduire pour l’installer à Montplaisir.
Regroupement... Il est vrai que l’histoire des Rroms est déjà “riche” en regroupements forcés...

Le nouveau préfet de la Loire a donc donné son accord a cette expulsion qui ne pouvait pas régler les problèmes mais à coup sûr les aggraver, puisque les familles
Roms allaient être concentrées sur le squat de Montplaisir, et que les liens tissés avec les écoles du quartier, des familles, et des associations dans le secteur du
squat Béraud et dans la ville étaient explosés.
Il semble bien que du côté mairie et préfecture, la priorité des priorités était d’exploser ce qui avait été construit pour une vie un peu moins précaire à Béraud, de
démanteler tout le travail de construction de solidarités. Pour que les Rroms partent.

Montplaisir : ghetto pour regrouper les familles Rroms de St-Etienne...

Les jours suivants, le réseau de solidarité a aidé tant bien que mal les familles concentrées au squat de Montplaisir à faire face à la situation.
Ce qui était prévisible s’est vérifié. Difficultés innombrables. Concentrer des dizaines de familles, une cinquantaine d’enfants, plus de 200 personnes au total, dans des locaux qui ne sont pas équipés pour les accueillir (problèmes de débit d’eau, absence de douches, problèmes de puissance électrique pour l’éclairage et la cuisine, manque de toilettes etc...) ne pouvait que rendre la situation des familles très difficile. Les militant-e-s du réseau de solidarité ont fait face comme ils ont pu, avec les familles Rroms.
A Montplaisir, on se rend compte combien la précarité commençait à reculer à Béraud, et que des familles commençaient à pouvoir faire des projets, avec la scolarité des enfants etc...
C’est évident qu’à Montplaisir, les conditions de vie actuelles ne pourront pas durer. C’est un ghetto Rrom, un centre de regroupement, de parcage des Rroms, qui a été créé.

A noter qu’à un moment, au cours des derniers mois, la mairie (Mme Dumont, adjointe) s’était engagée à ce que certaines familles (avec enfants, ou avec des personnes handicapées...), puissent accéder à des logements ou hébergements relais. Promesse non tenue et déclarée nulle par la mairie.
Par ailleurs, les demandes d’entrevue au Maire M. Thiollière de la part du réseau de solidarité restent sans réponse.

Où veulent en venir la Préfecture et la mairie de st-étienne ?

La préfecture a donc pris les affaires en mains. A voir ce qui se passe, quel est l’objectif, à quoi avons-nous affaire ?
Mardi 28 août, réunion en Préfecture. Au cours de cette réunion étaient présents la Préfecture, la Mairie, le conseil général, l’ANAEM (qui a remplacé en mal le SSAE-service social d’aide aux étrangers), et le réseau de solidarité : 8 personnes, dont 2 représentants des familles Rroms. Le réseau de solidarité a du insister pour que des représentants des familles Rroms puissent participer à cette réunion. Le refus est récurrent. Il est vrai que c’est plus facile de régler le sort des gens en leur absence... La Préfecture a finalement du accepter.
Ce qui a été proposé et présenté comme un dispositif global apparaît comme un dispositif dont l’objectif est d’aboutir à l’expulsion d’un maximum de familles Rroms de St-Etienne, à l’image d’ailleurs de ce qui se passe cet été dans d’autres villes. Sauf qu’il faut tenir compte de deux “contraintes” : la Roumanie fait maintenant partie de l’Union européenne (et tout Roumain a la liberté de circuler en Europe et de rester 3 mois dans un pays), et l’activité du réseau de solidarité, des personnes et associations solidaires.

C’est un dispositif en 3 volets qui a été présenté :

- “rapatriement humanitaire” en Roumanie, avec l’ANAEM. Sur la base du volontariat, les familles sont invitées à s’inscrire pour prendre un car. 153 euros par adulte et 47 par enfant leur seront remis à l’arrivée dans une des trois villes de destination en Roumanie. Elles laisseront un n° de téléphone, on leur donnera une liste des ONG roumaines, censées les aider à élaborer un micro-projet économique qui sera validé ou non par cette ONG, et si oui, l’ANAEM pourra aider au financement, financement auquel la famille devra apporter de l’argent, ce qui est un problème pour celles qui n’en ont pas... Le rapatriement peut aussi être fait bien sûr en l’absence de microprojet. Apparemment ce qui compte c’est que les familles partent. Une information circule (à vérifier plus avant) selon laquelle la police roumaine indique aux familles à l’arrivée qu’elles n’auront pas le droit de quitter la Roumanie pendant 2 ans. Ce qui n’aurait d’ailleurs aucune base légale compte tenu de la législation européenne, mais pourrait être une incitation forte...
Selon l’ANAEM, il est hors de question que de tels projets commencent à être élaborés ici en France. C’est : vous partez d’abord et vous verrez là-bas. A noter que pour suivre ce dispositif là, l’ANAEM a ... deux agents en Roumanie, en tout et pour tout.
Le problème est qu’en Roumanie les Rroms sont l’objet de discriminations lourdes.

- une action “d’écoute + enquête sociale” a été mise en place à la mairie annexe de la Métare, avec des personnels de la Mairie (une AS du CCAS), du conseil général (une AS), et quelqu’un de l’ANPE. Officiellement, c’est le volet “intégration” du dispositif. Il consiste à recevoir les familles qui le souhaitent, pour les entendre sur leur employabilité en France (compétences, projets éventuels) ou leur situation de détresse sanitaire (avoir une pathologie très grave). Tout est ensuite transmis à la Préfecture pour décision. C’est sorte de cellule a donc été chargée de faire un tri d’une poignée de personnes auxquelles un titre de séjour pourrait être accordé en France pour un temps.
A noter que le travail du réseau de solidarité a permis à trois Rroms de trouver un emploi (et d’obtenir un titre de séjour approprié) au cours des derniers mois. C’est un parcours d’obstacles pour y arriver (DDTE etc...) ! D’autant qu’en plus l’employeur doit verser à l’ANAEM une somme de l’ordre de 1 000 euros pour avoir le droit d’embaucher une première fois un étranger dans cette situation.
Une dizaine de militant-e-s du réseau de solidarité sont en train d’aider d’autres personnes Rroms à construire un projet.
Le problème avec cette “cellule d’écoute”, c’est que, ouverte le jeudi 30 août, elle a été fermée le vendredi 31, après avoir reçu apparemment seulement deux familles... C’est pourquoi le réseau de solidarité demande une prolongation du travail de cette cellule. Car il est vrai que les familles Rroms ont eu ces deux jours-là d’autres urgences : l’inscription et l’entrée à l’école pour une cinquantaine d’enfants, et l’arrivée massive des OQTF : “obligations de quitter le territoire français”, délivrées par le Préfet.

- OQTF, “obligation de quitter le territoire français” (sous un mois) pour les personnes que la Préfecture estime en situation irrégulière. C’est le volet “contrainte”, et apparemment le point central du dispositif, car c’est cela qui “marche”. Plus de 30 OQTF ont déjà été délivrés, contre lesquels des recours sont en cours. C’est sur la base du fichage réalisé lors de l’évacuation du squat Béraud que ces OQTF sont délivrés. _ Un étranger européen est notamment en situation irrégulière en France s’il est là depuis plus de 3 mois sans autre titre de séjour, et s’il ne peut justifier de ressources financières égales au RMI ou au minimum vieillesse, allocations familiales non comprises. Mais là où ça se complique c’est qu’il suffit de sortir du territoire puis d’entrer à nouveau pour que la durée de présence retombe à zéro. Et les familles Rroms voyagent beaucoup...
Dès le lendemain de la réunion en Préfecture, les OQTF ont commencé à tomber... Comme de fortes incitations à choisir l’inscription dans le car, et les 153 euros du “rapatriement humanitaire”... Les OQTF “tombent” d’ailleurs dru sur des gens qui ont besoin de soins médicaux, et des familles qui viennent de mettre leurs enfants à l’école...
Parmi les destinataires des premiers OQTF :
- Des parents dont les enfants sont scolarisés, qui perçoivent les allocations familiales.
- Une personne gravement handicapée qui est dans un cursus de soins pour se faire opérer en France en vue de retrouver une partie de l’usage de ses jambes.
- Une personne en fauteuil roulant qui va être hospitalisée en vue d’une opération le 3 septembre, qui possède une carte d’invalidité pour un taux d’incapacité égal ou supérieur à 80%, qui est reconnue en maladie de longue durée par la sécurité sociale.
- Des personnes qui ont entamé des recherches d’emplois.
Pour plusieurs d’entre elles leur dernière date d’entrée en France est de moins de trois mois, ce qui rend l’OQTF illégale.
On comprend beaucoup mieux maintenant pourquoi la préfecture et la mairie ont entassé les familles sur le site de Montplaisir : il est ainsi plus facile de les contrôler et de les embarquer le cas échéant.

Janina, et sa fille Damaris née en France / St-Etienne-Montplaisir / 7 septembre 2007

Il s’agit bien d’une logique inhumaine et xénophobe, qui vise à « faire du chiffre » pour participer à l’objectif fixé par Sarkozy et Hortefeux aux préfectures : 25 000 expulsions en 2007. Une logique qui brise le travail de solidarité des associations, de dizaines de personnes, de travailleurs sociaux pour aider ces familles à pouvoir vivre en France dans le respect de leur dignité, à y nouer des liens. Et ce dispositif est appliqué à des citoyens de l’Union Européenne qui pourtant devraient bénéficier du principe de libre circulation dans l’Union Européenne.
Il semble que sur la région lyonnaise, environ 350 personnes Rroms ont été de cette façon “rapatriées”.
Evidemment, c’est tant pis pour les “dommages collatéraux” sur les êtres humains et les enfants. Tant pis aussi si tout cela se traduit par d’énormes gaspillages financiers. Car combien coûte tout ce déploiement policier et judiciaire ? Combien coûte au total une expulsion dans ces conditions ? 1 000 à 5 000 euros ? Combien le coût total de fonctionnement de cette machine. Pour un “résultat” final aléatoire en termes d’expulsions, car nous sommes en Europe, et compte tenu de la légalité européenne et sachant que les Rroms sont des citoyens européens, et que sans solution à leur misère en Roumanie nombre de familles reviendront un jour ou l’autre... De l’argent qui pourrait être utilisé bien autrement. Mais entre temps, c’est vrai, on aura fait “du chiffre”.

En attendant, 45 enfants Rroms ont repris le chemin de l’école...

Ce qui est une nouvelle preuve de la force de la vie et de la solidarité. Expulsées, coupées de leurs relations avec les centres sociaux, les associations et les écoles du quartier du squat Béraud, les familles avec enfants se sont retrouvées dans une situation très difficile à la veille de la rentrée scolaire.
Côté mairie, il s’avère que rien n’avait été prévu et préparé, bien au contraire. Une nouvelle preuve qu’il s’agissait de démanteler le squat Béraud, et puis c’est tout, que chacun se démerde.
Sauf qu’il y a quand même la loi, qui en France prévoit que tout enfant a le droit d’aller à l’école. Et qu’il existe des services publics pour qui cela a encore du sens. Il faut saluer ici la correction de l’IEN et des personnels de l’Inspection d’Académie, qui dans cette affaire ont dit que tout enfant Rrom vivant à St-Etienne avait le droit d’aller à l’école. Et qui ont permis, conjointement avec l’action des militants du réseau de solidarité, que les enfants soient inscrits en mairie (qui a obligation de les répartir dans les écoles). Et qu’ils soient accueillis dans les écoles de Montchovet, les Ovides et Beaulieu, dès vendredi 31 août, avec du personnel pour les accueillir. Puis pour quelques autres enfants au Collège Jean Dasté.
Les enfants y sont allés accompagnés de leurs parents et de militants du réseau de solidarité. Avec des cartables, comme les autres enfants.
ça s’appelle la vie, et ce n’est pas près de s’arrêter.

Messages

  • Rassemblement devant la Préfecture mercredi 12 septembre à 13h

    Le réseau de solidarité avec les familles roms a décidé d’organiser un rassemblement devant la préfecture, Mercredi 12 septembre à partir de 13H pour déposer les recours individuels auprès du préfet.

    Par ailleurs vous trouverez à télécharger un modèle de lettre, que chacun peut bien sûr modifier à sa guise, pour demander au préfet l’annulation des OQTF notamment pour les parents des enfants scolarisés, les malades et handicapés.
    On peut l’envoyer par courrier ou par mail, la remettre dans la boite au lettre de la préfecture ou la faxer. On peut aussi téléphoner à la préfecture en demandant le secrétariat du préfet et faire part de sa demande d’annulation des OQTF.

    Ci-dessous les mails du préfet et de son directeur de cabinet ainsi que le téléphone et le fax de la préfecture :
    christian.decharriere@loire.pref.gouv.fr
    laurent.buchaillat@loire.pref.gouv.fr
    Tel : 04 77 48 48 48
    Fax : 04 77 21 65 83

    Georges Günther.