Le réseau de solidarité a enfin pu rencontrer le maire en personne mercredi, soit sept jours après l’expulsion. Le maire qui a ensuite tenu une conférence de presse jeudi...
Devant le blocage de la situation, il a été décidé de ne pas en rester là et de rechercher tout de suite les solutions à une échelle bien plus large. Mais on attend aussi de la mairie de St-Etienne qu’elle modifie son attitude...
La position affirmée par la Mairie de St-Etienne depuis le 17 juillet est au fond que les familles Rroms n’ont pas leur place dans la ville.
C’est cette position que M. Fayol-Noireterre, adjoint, chargé semble-t-il du “dossier rrom” a présenté ainsi dans le Figaro du 23 juillet :
"D’ici peu, le visa de tourisme de trois mois de la majorité d’entre eux arrivera à son terme, ils seront expulsables (...). Nous ne voulons pas qu’ils s’installent à nouveau dans des bâtiments abandonnés, c’est pour cela que ceux qu’ils occupaient, ont été mis hors d’usage et seront bientôt démolis".
"La municipalité tient dès aujourd’hui à la disposition des Roms, de façon très provisoire, un terrain nu débroussaillé et nettoyé, avec des WC chimiques, de l’eau et de l’électricité".
Le terrain qu’a proposé la mairie à Montmartre, entre le chenil de la SPA et le cimétière, est un terrain vague, et qui sent le chien, parsemé de décharges diverses, dont la partie centrale vient d’être fauchée. 2 WC chimiques (donc ultraprovisoires) ont été installés. La mairie a promis un point d’eau et l’électricité, mais a refusé catégoriquement la demande du réseau de solidarité d’installer des algécos pour les familles (de tels algécos ont pourtant existé sur ce terrain au cours des années passées, pour héberger des SDF puis des familles tchétchènes. Mais ils ont été démontés depuis).
Dans ces conditions, le réseau de solidarité ne veut pas de ce qui deviendrait immédiatement un bidonville rrom, avec toutes les conséquences désastreuses qui suivraient.
Le maire de St-Etienne, Maurice Vincent, avec ses adjoints Pierre Fayol-Noireterre et Joseph Ferrara, a tenu jeudi 24 juillet une conférence de presse en mairie.

Photo Forez-info. (Voir).
Le Progrès de vendredi (article d’André Gavidia) rapporte que le maire a déclaré :« J’assume ». Il a confirmé sa position : les Rroms doivent partir en Roumanie. Et indiqué aussi : “Nous nous sommes également tournés vers l’évêché pour trouver une solution d’hébergement en dur. La réponse a été négative.” Un peu étonnant comme demande, quand on sait que la ville a elle-même d’une façon ou d’un autre des centaines de logements vides...
Le Maire a dit aussi, concernant l’expulsion : « Nous n’avons pas été bons », comme si ce qui s’est passé n’avait été voulu par personne : « Trois camions avaient été dépêchés pour récupérer les affaires des familles. Puis les accès devaient être sécurisés »...
Dans une interview à Lyon-capitale, le maire de St-Etienne à précisé : “il était prévu de rendre ce squat non squatable et je regrette qu’on n’aie pas envoyé plus rapidement des camions de la municipalité pour récupérer les affaires des Rroms. Mais on a envoyé des camions, on a envoyé 3 camions pour récupérer leurs affaires, mais un peu trop tard c’est exact (...) Certains ont perdu des affaires mais d’autres ont été récupérées et sont entreposées dans un local municipal, mais c’est vrai que sur ce plan là l’intervention n’a pas été optimale. Voilà, moi j’assume cette imperfection qui n’était pas volontaire”.
Un peu court. Lors d’une expulsion, la légalité est que les affaires des personnes doivent être emmenées dans un garde-meuble (la garde étant aux frais des expulsés) et peuvent y être récupérées. Comment est-il possible de détruire 95% des affaires de 120 personnes sans s’en rendre compte, alors que cela a quasiment duré une journée ? Qui a donné les ordres de ce saccage et qui les a exécutés ?
Et malheureusement pour la version de la mairie, des témoignages précis établissent qu’elle est inexacte : il n’a à aucun moment été question sur place que les 3 camionnettes des services municipaux récupèrent les affaires des familles.
Le cassage des vitres a commencé dès 8h20. A 9h, soudage des portes des grilles. Après 10h30, il n’y avait plus aucune force de police nationale à l’intérieur du périmètre de l’école, mais seulement des personnels des services techniques, et la police municipale (qui a occupé le terrain jusqu’au soir). Vers 11h, on s’est rendu compte qu’il y avait aussi dans une cour un gros camion de pompiers. A 14h, on s’est rendu compte que ça brûlait. A 16h, ça brûlait encore, et la fumée sortait de l’intérieur des bâtiments...
Les seules affaires emportées par la mairie ont été mises de côté sur l’insistance de membres du réseau de solidarité : des bouteilles de gaz (on comprend d’ailleurs, compte tenu de l’incendie qui a suivi, que cette demande ait été acceptée), deux étagères, un petit meuble et quelques livres de la salle des enfants. En tout et pour tout.
Une dizaine de matelas, quelques vélos et quelques ustensiles et mobiliers et jouets ont d’autre part été sortis par 5 personnes du réseau à qui une 1/2 heure a été accordée pour cela au moment de la sortie des familles, après négociation avec l’huissier et un responsable de service de la mairie ; et emmenés en fin de matinée dans des voitures et une petite remorque (pour les matelas). Les familles, elles, ont eu quelques minutes pour emporter quelques affaires personnelles, et tout le reste, tout ce avec quoi ces familles vivaient depuis des mois, a été saccagé.
C’est ça la réalité de ce qui s’est passé. Le maire de St-Etienne ne peut pas ne pas la regarder en face, et s’il ne veut pas couvrir ces actes inadmissibles, on attend de lui qu’il ordonne une enquête et prenne les sanctions nécessaires, et dépose une plainte auprès du Procureur de la République.
Il est nécessaire d’éclaircir aussi le rôle des pompiers. Qui les a appelés et pour faire quoi ? Et quelle a été leur attitude dans les incendies de pneus ? Incendies de pneus en plus formellement interdits par le règlement sanitaire départemental (1)
Oui, il y a beaucoup de questions auxquelles il faudra bien apporter des réponses sérieuses.
Pour l’immédiat, bien sûr, ce qu’on attend de la mairie de gauche, c’est qu’elle sorte de sa fermeture et prenne sa part du relogement des familles qu’elles a mises à la rue. Le maintien du blocage n’est bon pour personne : ni pour les familles et enfants Rroms, bien sûr, ni pour toutes les personnes et associations qui participent à la solidarité, ni pour la mairie elle-même.
(1) Le règlement sanitaire départemental (voir sur le site internet de la Préfecture) prévoit dans son article 163 “émissions de fumées” : les foyers de plein air utilisés en vue d’assurer la protection des cultures et vignobles contre les gelées, le forçage des légumes et l’échauffement des serres ne pourront être alimentés par des combustibles de nature à provoquer des fumées opaques ou des produits de combustion toxiques. Sont notamment interdits, les brûlages de pneumatiques et des huiles de vidange”.
On ne voit pas comment ce qui est toxique à la campagne ne le serait plus en ville. Alors comment des pompiers ont-ils pu accepter d’être mêlés à une pareille affaire ?