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Tous les chemins mènent aux Roms

derrière la Gare du Clapier-Saint-Etienne

mardi 14 septembre 2004, par Marie-Pierre Vincent

Alexandru, Ivan, Mirella, Romika, David, Janina, ils sont des milliers à fuir la Roumanie, la Moldavie, la Transnistrie, la Bosnie et bien d’autres pays encore où la persécution à leur égard dépasse ce qu’un être humain peut endurer.
Les brutalités associées aux discriminations et au racisme de toute une société et de ses dirigeants les ont conduits à fuir le pays où ils sont nés. Ils sont roms.
Ils sont partis de leur pays, avec presque rien, il y a un jour, un mois, un an, plusieurs années, certains arrivent juste maintenant. Ils sont passés par l’Autriche, la Hongrie, l’ Allemagne, chassés systématiquement de tous les pays de notre Europe.

Ils sont une vingtaine de familles roms sur le terrain des Charbonnages, à Saint-Etienne, entre la voie ferrée du Clapier et le Musée de la Mine.
Ils n’avaient pas grand-chose en partant, ils n’ont désormais plus rien. Ils avaient des métiers, mais peu de possibilité de les exercer dans leur pays, et maintenant il leur est impossible de les pratiquer en France sans permis de travail.
Quelques familles ont occupé les deux ou trois cabanes du terrain des Charbonnages.
C’est petit, humide, cela ressemble fortement à une bicoque de bidonville, mais au moins c’est un toit .
D’autres couchent à trois ou quatre dans des voitures, avec les petits, des bébés.


Un seul point d’eau est disponible pour 60 à 80 personnes. Bien évidemment, il n’y a aucun sanitaire.
Certaines familles squattent un garage en face de la Gare du Clapier, d’autres essayent de trouver refuge dans d’autres endroits de Saint-Etienne.
Ils n’ont aucune ressource financière.
Tous veulent travailler, mais sans asile territorial, pas de permis de travail .
La Roumanie entre en 2007 dans l’Europe. La Roumanie est donc considérée par la France comme un pays démocratique et libre de droit. Donc évidemment, il est impossible pour une personne venant de Roumanie d’obtenir un asile politique ou territorial. Ce serait "une blague" !
Les parents sont actifs, essayent par tous les moyens de se renseigner, de trouver des aides auprès de l’administration française.

Une aide, c’est peut être aussi mettre en place une simple procédure d’humanité qui fasse que les enfants puissent manger et que les roms roumains, moldaves, bosniaques, hongrois... les roms de tous pays , nomades ou sédentaires trouvent en France un pays d’accueil correspondant à ce que les Droits de l’Homme tentent de signifier.

Certains enfants sont scolarisés, d’autres non. Certains parents ont pu avoir accès à une Carte Vitale. D’autres pas. Les histoires et les parcours de vie sont différentes pour chacun.
Ce sont nos voisins et désormais des amis qui nous accueillent pour un après-midi ou une soirée dès que nous allons les voir, des personnes qui ont besoin d’être aidées dans les circonvolutions de l’administration française.
Un collectif vient de se créer récemment : Tous les chemins mènent aux Roms

avec de nombreuses actions en préparation
- Rencontrer l’élu de la Ville en charge de la vie sociale, de l’action sociale plus précisément
- Interpeller le Conseil général afin que soit rétablie l’allocation pour les enfants, allocation qui a été supprimée pour le mois de septembre.
- Faire la demande pour les autres familles ne bénéficiant pas de cette allocation.
- Trouver des maisons pour l’hiver à venir .
- Interpeller le conseil municipal afin de mettre en place un accueil civilisé aux personnes ne faisant pas partie de la Communauté Européenne.
- Rédaction de dossiers et autres demandes administratives.
- Trouver éventuellement des employeurs pour travailleurs saisonniers n’ayant pas forcément tous les papiers nécessaires.
- Trouver des chauffages au fioul pour les personnes habitants dans les "squats".
- Discuter avec Scolarest pour les enfants scolarisés allant à la cantine.

Ce sont des idées " en vrac" .

Il nous faut réfléchir et tout faire pour que soit mis en place, sur Saint-Etienne, des conditions d’accueil, de vie et de dignité humaine pour les familles roms.

"une des entrées d’ un squat, dénuement et humidité . "

les photographies de cette page : ©marie-pierre vincent septembre 2004

Messages

  • …et tous les Roms mènent par les chemins l’humanité des peuples nomades.
    Que cherche donc un nomade, depuis que l’homme est homme, grâce à la femme qui l’enfante ?
    Il cherche un bon coin pour s’arrêter.
    Chemin roulant, marchant, poussant, caravannant ou chevauchant auparavant, le nomade vit — n’emportant jamais plus que ce que la bête peut porter —, sur le sédentaire.
    Il lui apporte la part de liberté et d’horizon dont ce dernier s’est volontairement amputé pour devenir un Monsieur De Puipeux. Ma Maison, ma Voiture, mon Tertre, mon Chien, ma Femme, mes Enfants.
    Ce sédentaire qui croît que la terre et ce qu’elle produit peut lui appartenir. Ce sédentaire, nos pères, qui, après avoir révolutionné la France pour abolir les privilèges, pour ce qui concerne l’Europe, n’a pas hésité à continuer aux noms des lumières, à parcourir les sept mers pour la voler à ceux qui ne la possédaient pas. Ce sédentaire qui n’hésitera pas à se barricader, à sortir ses chiens — vu sur une pancarte : "attention chien très méchant et fort peu nourri"— et ses fusils plutôt que de partager ce qu’un philosophe à nommé : "la propriété, c’est le vol".
    Notre pays bouffi de surconsommation ne serait pas capable d’accueillir, d’après un éminent socialiste, issu de l’extrème gauche, "toute la misère du monde".
    Notre pays de 62 millions d’habitants ne pourrait pas nourrir quelques millions supplémentaires ?
    Notre pays où quinze département sont suffisants pour nourrir l’ensemble de ses habitants.
    Où est l’assiette du pauvre ?
    Où est la conscience que la république laïque, chassant l’opium du peuple de l’enseignement il y a cent ans bientôt, a mis enseigné à la place ?
    Mais, c’est bien connu, il faut prendre aux riches pour donner aux pauvres. C’est quoi un riche ?

    Bruno Clémentin
    (ancien patron de cirque)

  • si cela se passe en france, pourquoi s etonner de ce qu il se passe en hongrie, en roumanie et autres pays qui traitent ces personnes comme des etres de seconde categorie...

    a ceux qui sont en france, je pense qu un petit courrier a vos medias qui n en parlent pas ou trop peu, aux autorites competentes (ou pas), ministeres, etc. ne serait pas une mauvaise idee.
    pour ceux qui habitent cette ville, des courriers a vos elus, des coups de telephone, des fax...

    malheureusement, pour qu une situation scandaleuse soit etudiee, la plupart du temps, il faut qu elle soit mediatisee...

  • Michelle Mézard fait partie d’une association "Romeurope" qui regroupe Médecins du Monde, la LDH, le Gisti, etc...

    "(...) Les Roms roumains ne sont ni des nomades, ni des gens du voyage. Ce sont des sédentaires qui ont fui les
    discriminations et l’exclusion extrême dont ils sont victimes dans leurs
    pays. A l’instar des noirs en Amérique du Nord, les Roms roumains ont
    été esclaves dans les principautés roumaines et moldaves jusqu’en 1856.

    L’abolition n’est manifestement pas complète dans les esprits. Malgré
    une loi récente anti-discrimination, les Roms sont encore aujourd’hui
    traités par la population roumaine majoritaire comme méprisables et
    infréquentables : on peut voir dans certains lieux des affiches
    interdisant l’accès aux Roms... Les insultes pleuvent dans les lieux
    publics : ils sont traités de " brunet ", terme qui fait allusion à la
    couleur de leur peau. Dès l’école, les enfants Roms doivent subir ces
    insultes et le mépris au point que la plupart d’entre eux ne la
    fréquentent plus.
    Dans une Roumanie qui se remet difficilement du joug totalitaire de
    Ceaucescu et en proie à des difficultés économiques importantes, les
    Roms sont particulièrement touchés : plus de 80% d’entre eux sont au
    chômage. Sans ressources, sans assurance maladie, ils ne peuvent se
    faire soigner, ni même assurer tous les jours la nourriture de leurs
    enfants. Ils vivent dans des quartiers défavorisés à l’écart des villes
    et des villages.

    Dans ces conditions comment ne pas comprendre ceux qui dans une
    stratégie de survie choisissent l’exil ?
    Depuis 1989, une petite minorité d’entre eux viennent chercher refuge en
    France en espérant y trouver un avenir meilleur pour leurs enfants. Ils
    sont actuellement 3 à 4 000 en Ile de France, un peu plus nombreux
    depuis le 1er janvier 2002 qui a vu heureusement l’ouverture des
    frontières de l’espace Schengen aux citoyens roumains. En arrivant en
    France, bien que demandeurs d’asile , ils ne bénéficient d’aucun
    hébergement et s’installent donc par leurs propres moyens.
    C’est ici, ou dès leur voyage, que commencent à intervenir des réseaux
    qui les exploitent et auprès desquels ils vont acquérir des carcasses de
    caravanes qui vont leur servir d’habitat. Ainsi commence la confusion
    qui les fait étiqueter comme nomades ou gens du voyage alors qu’ils
    n’ont jamais vu une caravane en Roumanie. Les réseaux leur indiquent
    également les terrains où ils vont pouvoir s’installer et compléter
    l’espace caravane par quelques constructions précaires, semblables à
    celles des bidonvilles. Ils y vivent dans des conditions sanitaires
    déplorables (points d’eau insuffisants, absence de wc, ordures ménagères
    non ou insuffisamment ramassées)... comme dans leur village roumain.

    Médecins du Monde qui travaille depuis 10 ans auprès des Roms constate
    au quotidien les conséquences de ces conditions de vie sur la santé :
    infections saisonnières ORL et bronchopulmonaires à répétition,
    infections dermatologiques et intestinales, allergies, affections liées
    au stress, ulcères gastroduodénaux, dépression. hypertension
    artérielle... Théoriquement, toutes ces personnes ont le droit à une
    prise en charge de leurs soins hospitaliers par l’AME (Aide Médicale
    Etat) ou la CMU (Couverture Maladie Universelle). En pratique, la quasi
    impossibilité d’obtenir des domiciliations empêche l’ouverture des
    droits. D’où un retard terrible dans l’accès aux soins.

    En tant que demandeurs d’asile territorial, statut qui peut durer de
    quatre mois à deux ans selon les Préfectures, ils n’ont le droit ni au
    travail, ni à aucune indemnité. Ils doivent donc trouver des ressources
    pour subvenir aux besoins quotidiens de leur famille. Certains arrivent
    à trouver du travail non déclaré. Beaucoup vivent de la mendicité.
    Quelques uns s’égarent et se laissent entraîner par les réseaux à
    commettre des vols, mais ils sont en minorité et montrés du doigt (mais
    pas dénoncés) par leurs compagnons de misère.

    L’exploitation des handicapés est une toute autre affaire. Elle existe
    comme l’ont montré si bruyamment les médias, par les méfaits de quelques
    personnes. Elle doit être résolument dénoncée et réprimée comme une
    atteinte inadmissible à la dignité humaine. Encore faut-il ne pas
    confondre victimes et bourreaux et rechercher les vrais coupables, ceux
    qui sont à l’origine du trafic.
    Il est urgent d’arrêter de couvrir d’opprobre toute une communauté. Non,
    les Roms roumains ne sont pas tous impliqués dans le trafic des
    personnes.

    Non, les femmes romani ne se prostituent pas : c’est contraire à la
    culture rom.
    Oui, les Roms souhaitent avant tout protéger leurs enfants et les
    envoyer à l’école : malheureusement seule une minorité obtient la
    scolarisation.
    Non, les Roms ne souhaitent pas vivre en caravanes : ils aimeraient
    pouvoir être hébergés dans des maisons ou des immeubles.
    Oui, les Roms souhaitent gagner leur vie en travaillant. Les expulsions
    incessantes, les interventions répétées des forces de l’ordre, les
    broyages de caravanes, les raccompagnements de quelques uns à la
    frontière ont fait depuis dix ans la preuve de leur inefficacité.

    Les Roms reviennent, car malgré la précarité de leurs conditions de vie
    en France, c’est moins dangereux ici. Il est urgent de mettre en place
    un accueil conforme à la dignité humaine en évitant les grands
    rassemblements qui créent des zones de non droit où sévissent les
    réseaux mafieux. Si chaque commune fait l’effort d’accueillir quelques
    familles, la question est vite résolue. Bien sûr il faut également
    travailler en Roumanie, en étant conscients que beaucoup de temps sera
    nécessaire pour faire évoluer les mentalités de tout un peuple. Il
    faudrait en priorité faire en sorte que tous les enfants roms puissent
    avoir accès à l’éducation et à une formation professionnelle.
    Et si l’on commençait par leur permettre de suivre une scolarité normale
    en France ?"

    Michelle MEZARD
    Août 2002

    Voir en ligne : Lire aussi sur le site de Médecins du Monde un article sur la situation de certains Roms renvoyés en Roumanie

  • Que vont devenir les familles Roms installées derrière la gare du Clapier à St-Etienne ?

    Hier soir a eu lieu à la MJC de Beaulieu une réunion regroupant plusieurs associations travaillant dans le domaine social et des droits des étrangers (Collectif de soutien aux Roms, Cimade, Secours catholique, Secours populaire, Espace Rimbaud, Terre des Hommes, Réseau Egalité des droits et lutte contre les racismes, SSAE, Comité de vigilance pour le respect des droits de l’homme, Tous les chemins mènent aux Roms, Forum des Réseaux citoyens...)

    Il y a été décidé d’engager plusieurs démarches :
    - Lettre au Conseil Général de la Loire pour que soit rétablie l’allocation pour les enfants, qui a été supprimée.
    - Lettre au Tribunal de Grande Instance (avec copie au Procureur de la République) pour prévenir les expulsions (Pour une expulsion, il faut une décision d’un juge)
    - Lettre à Scolarest et à la mairie à propos des repas des enfants scolarisés (on sait que la ville paie à Scolarest des repas non pris et même non fabriqués...)
    - Lettre au Préfet pour lui demander d’agir pour l’hébergement des familles...

  • Suite à une rencontre avec des familles Roms hier soir sur le terrain du clapier, et parce que la ville de st-étienne est quand même concernée au premier chef par ce problème, et qu’il s’agit d’abord d’une question de dignité humaine, j’ai demandé aujourd’hui - après une discussion avec Mme Falduzzi, chef de cabinet du maire - par lettre à M. Thiollière, Maire de St-Etienne, une intervention de la mairie :

    Je me permets d’attirer votre attention sur la situation des familles Roms
    qui vivent pour l’instant sur les terrains situés derrière la gare du
    Clapier.
    Je le fais avec le souhait que soient trouvées des solutions concrètes.
    On ne va pas résoudre en quelques jours les problèmes de toutes les familles
    Roms d’Europe. Mais nous avons une obligation d’intervention, quand ils sont
    en cause, pour que soient respectés un minimum les droits fondamentaux de
    tout être humain.
    Des familles Roms vivent dans notre ville depuis 1 à 2 ans, pour certaines
    dans des conditions de précarité totale.
    Sur le site du Clapier, une dizaine de familles - qui semble-t-il sont à
    St-Etienne de façon non passagère - sont "installées" dans des baraquements
    et des voitures.
    Dans ces familles, il y a des enfants, certains en bas âge. Ils mangent de
    façon irrégulière, ils n’ont en général ni eau ni électricité, et surtout
    pas de chauffage, alors que le froid arrive.
    Une dizaine de ces enfants sont scolarisés dans les écoles du quartier.
    Ceux-là prennent depuis quelques jours un repas par jour à la cantine de
    l’école.
    Dans ces conditions, il revient aux élus que nous sommes de prendre des
    mesures pour que soit respectée la dignité humaine. Surtout quand il s’agit
    des enfants.
    C’est pourquoi, Monsieur le Maire, je vous demande de bien vouloir prendre
    des dispositions pour que ces familles avec enfants - une dizaine de
    familles semble-t-il - puissent être hébergées dans des logements d’urgence
    de la ville de St-Etienne, et aussi que l’OPAC, qui possède des centaines de
    logements vides et chauffés, fasse un effort pour contribuer à régler cette
    situation inhumaine (...)

    Une démarche semblable a été faite auprès du Préfet de la Loire.
    Hier 16 septembre, il semble qu’une réunion ait eu lieu en mairie pour discuter du problème. On ne sait pas exactement en quels termes, mais la vigilance semble nécessaire.