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Le collectif personne à la rue à la mairie pour interpeller les élus sur le droit au logement des familles à la rue...

Au conseil municipal de St-Etienne, c’est : "ferme ta gueule ET cause toujours".

mardi 6 novembre 2012, par Roger Dubien

Il y aura beaucoup d’autres choses à dire et à comprendre sur ce qu’est en train de faire la mairie de St-Etienne. Ce qui suit est juste pour raconter l’ambiance ce lundi soir...

Ce lundi soir 5 novembre, 50 à 70 personnes se sont retrouvées devant la mairie, avec le collectif “pour que personne ne dorme à la rue”, avec la volonté annoncée lundi dernier par lettre au maire et à chacun-e des élu-e-s, d’assister au conseil municipal (qui est public, de toutes façons !) et une demande que quelqu’un puisse prendre la parole pour parler de la question des sans logements, et qu’un débat ait lieu dans le conseil sur ce sujet.
A 18h, toutes les portes d’entrée de la mairie, en haut des marches, sont bloquées. Avec des policiers à l’intérieur. Accès public au conseil municipal impossible, donc. On est prié de passer par le garage. Tout le monde se rend sous les arcades, devant l’entrée du garage, et se présente à la lourde porte. Elle s’entrouvre. Apparaissent derrière la porte le directeur de cabinet du maire, M. Royon. Et deux adjoints : MM Ferrara (adjoint à la sécurité) et Fayol-Noireterre (présent dans toutes les expulsions de Rroms et autres familles de logements réquisitionnés par les associations, ces dernières années). Derrière, un nombre certain de policiers municipaux, et deux policiers des renseignements généraux, goguenards.

brigade d’accueil pour filtrer les entrées au conseil municipal, par la porte blindée des garages : le directeur de cabinet du maire, deux adjoints, et des policiers. Bienvenue dans la maison commune !...

La demande est faite de pouvoir assister au conseil et que quelqu’un du collectif “personne à la rue” prenne la parole. Réponse : hors de question que vous preniez la parole (1). D’accord pour que vous assistiez au conseil, mais dans la limite des places disponibles pour le public dans la salle, soit 45. “Réfléchissez”. On se concerte une minute maximum, et on décide que, les choses étant ce qu’elle sont, on va quand même y aller à 45 et écouter ce que les élus vont dire sur le sujet, suite à la demande faite à chacun d’eux. Trop tard : M. Royon déclare que maintenant il ne reste plus que 15 places. 30 autres personnes se seraient installées dans la minute précédente. Elles sont passées par où, celles là, puisque la mairie est cadenassée ? On ne saura pas. Au point où on en est, on décide d’y aller quand même à 15, pour voir. Les autres attendent, sous les arcades...
En arrivant dans la salle du conseil, on découvre qu’il y a effectivement du monde dans les places du “public”. On se rendra compte après qu’il s’agit pour la quasi totalité de personnes venues avec l’élu UMP Perdriau, pour soutenir une de ses interventions, cartons en mains. Ils n’ont donc pas été filtrés, eux...
Le maire de St-Etienne ouvre le conseil comme si de rien n’était. Pour commencer l’ordre du jour, présentation des “orientations budgétaires” pour 2013. Bref, les finances de la ville et le programme, avant le vote du budget en décembre. Parmi tout ça, il est question d’”accélération de la mutation urbaine”. Au chapitre “une ville plus solidaire”, on apprend que dans “les nouvelles solidarités en direction des personnes défavorisées”, un quatrième logement “jeune” sera créé ! Et que le système de vidéo-surveillance sera totalement rénové, avec installation de nouvelles caméras (ça c’est des millions d’euros !)
Il y a aussi un chapitre “une nouvelle vie démocratique avec l’implication des citoyens”. D’ailleurs, on est en plein dedans ce soir.

Ouverture de la discussion. Sur des feuilles mises côte à côte (une lettre par feuille) des demandes apparaissent dans le public : “et les Roms ?”. Et de vive voix : “Et pour le logement des sans-abri ?”. C’est pendant l’intervention d’un élu de droite. Mais pendant plusieurs minutes tous les élus regardent les pancartes au lieu d’écouter ce qu’il raconte...
Plus tard, on entend que 2 000 logements vont encore être détruits. A nouveau, des slogans : “500 sans-abri !”, “combien de nouveaux logements construits ?”, “et les 500 personnes qui sont dehors ?”
Réponse de M. Vincent : “je vous ai proposé qu’une délégation soit reçue par M. Fayol-Noireterre, adjoint”. Cette sortie-là, on la connaît bien maintenant. Tout ça fait irrésistiblement penser à la blague : "la dictature, c’est : ferme ta gueule ; la démocratie, c’est : cause toujours”. A la mairie de St-Etienne, on a les deux pour le prix d’une : l’interdiction de parler devant le conseil, et même d’y accéder librement, c’est “ferme ta gueule !”. Et les délégations (15 ? 20 ? 25 ? depuis 2008) reçues par M Fayol-Noireterre, c’est : “cause toujours !” Aucune n’a jamais débouché sur rien de positif...

Suit vers 19h une escarmouche entre le maire et les élus UMP, qui quittent la salle...
Monique, très fort, à tous les élus : “c’est bon, on est entre nous, on va pouvoir parler d’autre chose”... Mais non, hors de question de parler du logement et des sans logement. Alors au final, vers 20h, ce qui restait de la délégation du collectif “personne à la rue” s’en va.
C’est clair qu’aucun élu ne dira rien de la question du logement. Et ça risque de ne pas s’arranger : l’un d’eux, qui semble ne pas se faire d’illusions, glisse en passant que les municipales approchent (début 2014) et qu’il ne s’agit pas de se faire éjecter de la liste. On baigne ici dans une atmosphère de courage, ça se sent bien. Pourtant dans les jours précédents, certains avaient confié leurs états d’âme, que cette fois c’était vraiment trop, ce qui était fait aux rroms à St-Etienne, et qu’ils allaient...
Mais non. On en est là. Triste.

Roger Dubien
Conseiller municipal (dans l’opposition à la mairie UMP de Thiollière) de 1995 à 2008.

(1) Il faut rappeler que les réunions d’un conseil municipal sont publiques, c’est la loi.
Et qu’au cours des 30 dernières années à St-Etienne, il n’y a eu jusque là qu’une seule fois où le maire ait empêché le libre accès au conseil municipal : en juillet 1992, Dubanchet a fait intervenir les CRS pour sortir les stéphanois venus protester contre la vente du service municipal des eaux à la Générale et à la Lyonnaise. 20 ans après, on peut juger du résultat... Quand à Dubanchet, il a du démissionner, en 1994, à cause de la privatisation de l’eau justement.
Depuis, tous ceux qui voulaient assister au conseil y ont toujours accédé librement. Si les places étaient toutes prises dans l’enceinte réservée au public, ils pouvaient attendre leur tour dans le vaste couloir le long de la salle du conseil, d’où ils pouvaient entendre quand même les débats.
Très souvent, des délégations de stéphanois sont venues manifester - toujours pacifiquement - entre 1995 et 2008. La plupart du temps, elles ont pu prendre la parole devant le conseil. Et parfois un débat a eu lieu immédiatement avec les élus. Quand cela a été refusé, certains élus de gauche ont fait en sorte qu’il ait lieu quand même en abordant le sujet à l’occasion du 1er dossier qui pouvait avoir un lien avec, ou en faisant inscrire la question en “question diverse” discutée à la fin de l’ordre du jour.

Chose incroyable : avec Maurice Vincent, maire d’une municipalité de gauche, depuis 2008 la dérive se précise d’interdire le libre accès aux conseils :

- En novembre 2009, il y a déjà eu une tentative d’empêcher l’accès à la mairie, par les policiers municipaux avec l’adjoint à la sécurité M. Ferrara en tête. Il avait fallu insister pour que l’accès soit possible, puis pour que Pierre Rachet puisse prendre la parole devant le conseil municipal. (voir L’intervention du collectif « Pour que personne ne dorme dans la rue » devant le conseil municipal de St-Etienne)

Et deux fois il y a eu problème au conseil de communauté de St-Etienne métropole - présidé par Maurice Vincent -, réuni au Musée d’art moderne :

- le 7 février 2012, voir Le collectif "Pour que personne ne dorme à la rue" a interpellé le Conseil de communauté de St-Etienne Métropole
- le 19 mars 2012, alors que la question du logement social a été inscrite à l’ordre du jour, suite à la demande du collectif personne à la rue, le conseil a été bouclé par les CRS et seuls 25 militants du collectif ont eu le droit d’entrer dans cette séance publique (et de se taire). Il s’est quand même trouvé une élue pour protester, sans suite... Voir : Politique du logement social dans l’agglomération stéphanoise

On a de bonnes raisons - définitives - de ne pas regretter la municipalité UMP. Mais on n’acceptera pas qu’une municipalité de gauche fasse pire.
Question démocratie - entre autres - , le maire de St-Etienne file du mauvais coton.

Ce qui aurait été dit par le collectif "Pour que personne ne dorme à la rue" au conseil municipal, si...

Télécharger la prise de parole que le maire de St-Etienne n’a pas voulu entendre