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L’accord MEDEF et le projet de loi sur la “sécurisation de l’emploi” :
Imposer une régression sociale en utilisant le chantage à l’emploi...
mercredi 6 mars 2013, par
Selon la CGT et FO, 200 000 salariés, du privé et du public, ont manifesté - 175 cortèges - ce mardi 5 mars contre l’accord MEDEF-3 syndicats (CFDT, CGC, CFTC) dit “de sécurisation de l’emploi". La FSU et SUD étaient aussi présentes dans les manifestations.
Signé le 11 janvier, cet “accord” a été transcrit dans un texte de loi adopté par le Conseil des Ministres ce mercredi 6 mars. Il est annoncé qu’il passera à l’Assemblée Nationale début avril pour être promulgué en mai.
Environ 200 000 personnes, ce n’est pas rien. Surtout que des indices montrent qu’un mécontentement lourd est en train de se former dans le monde du travail.
L’accord et le projet de loi sont présentés comme une “sécurisation des parcours professionnels” au moyen d’une “réforme du marché du travail”.
Il est instructif de lire l’intitulé exact de l’accord : “Accord national du 11 janvier 2013 pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés”
Dans quel sens va cette "réforme" ? Elle s’inscrit dans les travaux pratiques du “choc de compétitivité” pour l’économie française demandé par le rapport Gallois et annoncé par le 1er ministre JM Ayrault en novembre 2012. Tout va mal parce que les entreprises souffriraient d’un excès de “charges” sociales et de contraintes (c’est-à-dire de droits des salariés). Alors même que les profits et revenus patronaux battent les records. Pas seulement en France, évidemment, au point qu’une majorité de Suisses vient de trouver ça exagéré...
Au nom de quoi cet accord est-il présenté comme une “sécurisation de l’emploi” ? En invoquant la prise en charge patronale d’une partie de la complémentaire santé, une taxation de quelques uns des contrats courts (1), l’instauration de “droits rechargeables” à l’assurance-chômage (2).
En échange de ces "avancées" qui donnent le vertige, le MEDEF se donne les mains encore un peu plus libres pour licencier. Car il s’agit d’une sécurisation des licenciements, et non d’une sécurisation des emplois :
art 18 : “accord de maintien dans l’emploi”. Il organise la possibilité pour une entreprise de modifier le temps de travail et de baisser les salaires au nom du maintien de l’emploi. Ce pour une durée de 2 ans, sans doute renouvelable... On peut prévoir donc la multiplication des chantages à l’emploi pratiqués depuis quelques temps dans de très grands groupes : vous avez le choix, soit vous acceptez la baisse des salaires, soit vous acceptez les licenciements... Et si un salarié refuse les mesures prévues par “l’accord”, il est ipso facto licencié, et c’est automatiquement un licenciement économique, et l’entreprise est quitte.
“déjudiciarisation des procédures de licenciement”. Les recours aux Prud’hommes pour les salariés sont rendus plus difficiles ou impossibles.
raccourcissement des délais de recours : après 24 mois, terminé.
Bref, si le MEDEF appuie à fond l’accord qu’il a signé, on comprend pourquoi...
On connaît les résultats de toutes les politiques menées depuis 30 ans avec cette logique là : aggravation de la situation du salariat, augmentation des profits du patronat. Le MEDEF poursuit son objectif : restaurer un “marché du travail” pur et dur, en revenant au fur et à mesure sur le code du travail et toutes les conquêtes sociales du 20ème siècle, qui ont affaibli la convention capitaliste du travail et engagé la construction d’une convention salariale du travail dans laquelle les producteurs ont des droits et ne sont plus une force de travail exploitable et jetable à merci.
A suivre...
Pour un décorticage plus approfondi de cet “accord” : http://www.cgt.fr
et le texte complet de l’accord
(1) La cotisation d’assurance-chômage pour les contrats à durée déterminée augmenterait de 7% pour les CDD de moins d’un mois, de 5,5% entre 1 et 3 mois, et de 4,5% pour ceux de moins de trois mois dans certains secteurs où il est habituel de ne pas embaucher en CDI... Mais les contrats saisonniers et les CDD de remplacement seraient exclus, seuls les CDD liés à des surcroîts d’activité seraient concernés.
En échange, le contrat à durée indéterminée conclu pour l’embauche d’un jeune de moins de 26 ans serait exonéré de cotisations patronales d’assurance chômage, pendant une durée de 3 mois.
Les surcotisations coûteraient 110 millions d’euros aux employeurs, et les allégements leur feraient économiser 155 millions d’euros. Le MEDEF ne recule devant aucun sacrifice...
(2) Probablement financés par une baisse du taux d’indemnisation qui n’est en général aujourd’hui que de 57,4% de l’ancien salaire...