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Pourquoi il faut aller manifester le 14 février...

mardi 3 février 2004, par Gérard Di Cicco

Cher(e)s collègues,
Amis d’ici et d’ailleurs,
Citoyennes et citoyens fiers et libres,

Ne vous y trompez pas. Les textes de loi qui s’annoncent ne résoudront en rien le problème qui nous occupe et vous préoccupe. Ils vous divisent et vous opposent parfois au lieu de faire l’unité et l’unanimité. Ils vous détournent de vos missions essentielles : éduquer, instruire, émanciper. Ils sont donc néfastes. Ils font même l’objet d’âpres débats au sein-même de la majorité chargée de les voter !!!

Toutes les lois laïques élaborées et votées le furent dans un souci d’apaisement et de pacification. Les lois de séparation de 1905, sous l’impulsion de Jean Jaurès et d’Aristide Briand, ont fixé un cadre qui a donné des espaces bien délimités dans lesquels les religions et la République ont petit à petit trouvé leur place après des siècles d’affrontements, parfois sanglants et terribles.

C’est ce cadre républicain et démocratique qui a fait de la laïcité un modèle apaisé à l’intérieur duquel tous les citoyens, d’ici et d’ailleurs, ont pu vivre ensemble et s’intégrer.

La laïcité est une force qui rassemble et qui émancipe. Elle ne peut être un instrument à montrer du doigt. Encore moins une machine à exclure.
Une loi liberticide serait dangereuse pour le modèle d’intégration et d’insertion républicaines. Dangereuse même tout court. Elle ouvre la porte à d’autres textes de lois qui risqueraient de s’en prendre à ce que nous avons de plus cher : la liberté de penser et d’être différent, pas forcément conforme à un modèle unique. L’éducation doit former, pas conformer : c’est là sa mission noble et première.

Le " voile " et autres couvre-chefs peuvent poser problème pour certains d’entre vous et pour la conception qu’ils ont de la laïcité. Disons-le : l’école, lieu d’accueil et de formation d’êtres en devenir, doit être préservée de toute emprise, de toute ingérence, de toute pression. Non pas neutre et aseptisée, ce qu’elle n’a d’ailleurs jamais été, ayant une mission d’accueil sans restriction aucune pour tous les enfants qui lui sont confiés. Sans distinction aucune de sexe, de race ou d’appartenance sociale.

Vous, nous, enseignants, sommes garants de cette équité-là. Et nous savons bien, comme partout, que le trop est l’ennemi du bien commun. Le droit à la différence, poussé à l’extrême, conduit immanquablement à la différence des droits, au communautarisme.
Comme toujours, les vieilles recettes sont les meilleures : dialoguons, débattons. Nous, les pédagogues, faisons usage de pédagogie pour expliquer, clarifier. Disons clairement les principes. Exposons avec fierté et courage nos vraies valeurs, celles qui ont fondé cette école républicaine que nous ont léguée nos pères fondateurs. Ne les avons-nous pas tous un peu négligés, ces grands principes, comme s’ils allaient de soi et ne demandaient pas, sans cesse et toujours, d’être dits et redits, entretenus et vivifiés, défendus et réaffirmés ?

Soyons fermes et lucides : certains principes ne sont pas négociables parce qu’ils sont les fondations -même de la maison commune que nous construisons tous ensemble et dans laquelle nous vivons. Et s’il y a des sanctions à prendre, que les équipes éducatives prennent leurs responsabilités. Ce sont bien elles qui sont au plus près du terrain et des réalités humaines, éducatives et sociales. Faisons-leur et faisons-nous confiance pour traiter les problèmes avec équité, humanité et justesse.

Certaines formes d’intolérance ou de discrimination ne peuvent être admises. Disons-le sans haine ni violence. Mais avec une juste fermeté. L’intolérant, de par son attitude, s’exclut de lui-même d’une communauté qu’il se doit de respecter et dont il doit respecter toutes les composantes, y compris celles qui n’ont pas forcément le même point de vue que le sien. Il doit surtout tenir compte des règles communes, élaborées par tous et dans l’intérêt de tous.

C’est tout cela, et ce que vous jugerez bon d’ajouter, qu’il faut dire et défendre. Personne ne le fera à votre place. La parole appartient à ceux qui la prennent. Après... Après, il sera trop tard. Juste, peut-être le temps de dire : si j’avais su...L’Histoire, parfois terrible et tragique, est là pour nous le rappeler : les peuples quoi n’ont pas d’histoire n’ont pas d’avenir. Il y a quelque chose de pire que de n’avoir pas réussi, c’est de n’avoir pas essayé.

Alors, essayons, pour une fois unis, de défendre et construire un vrai projet commun pour une vraie société un peu moins inhumaine, un peu plus fraternelle et surtout solidaire. Nos divisions ne pourront que desservir notre cause commune. Disons haut et fort notre attachement indéfectible aux valeurs de progrès et d’espoir. Disons non aux lois qui séparent, divisent et excluent. Soyons enfin un Peuple Souverain maître de sa destinée.

Vous êtes, nous sommes la Démocratie. Ne l’oublions jamais.

Messages

  • "Vous êtes, nous sommes la Démocratie. Ne l’oublions jamais"
    Si nous sommes tous ensemble la Démocratie, notre premier devoir est de la défendre envers et contre tous. L’imminance du danger mettant en péril la République et la Démocratie peut prendre divers formes, aujourd’hui nous sommes devant un tel danger. Une partie de nos concitoyens se sentant en marge de la société se réfugient dans une forme de différence culturelle surfaite.
    Que l’on dénonce de nouvelles symboliques vestimentaires liés à une appartenance qui voudrait s’ imposer à nous comme étant l’émanation identitaire d’une communauté religieuse.
    Où que l’on fasse mine de soutenir avec quelques arguments falacieux se prétendant progressiste.
    C’est pourquoi je n’irai pas manifester le 14 février car s’opposer à une loi liberticide aux cotés de gens faisant la promotion de l’intolérance me semble dangereux et déloyale d’un point de vue éthique.
    L’honnêteté intelectuelle voudrait que toutes personnes s’inspirant des valeurs humanistes de la civilisation moderne soient absentes d’un tel évènement.
    L’Histoire des femmes et des hommes sous d’autres cieux doit nous rappeller que par manque de vigilance des catastrophes humaines se sont produites près de chez nous avec leurs cortèges de peurs, de malheurs et de souffrances.
    L’honnêteté politique dans cette situation, serait de promouvoir l’émancipation citoyenne et politique d’une partie de nos concitoyens. Il me semble que ce genre de manifestation va à l’encontre du but recherché.
    De plus, je pense que le problème est plus lié aux disfonctionnements d’une institution qui a perdu le sens des valeurs qui depuis toujours ont été les siennes. Le malaise de l’Enseignement et la difficulté qu’il a résoudre ses problèmes démontre à l’evidence cette perte de valeurs.
    La perte de valeurs du corps enseignant reflète la faillite idéologique de notre société.
    Nous assistons a une montée générale des intolérances, chaques groupes humains étant le miroir sectaire des autres composantes de la république.
    Prennons garde ! sachons reconnaître l’ennemi qui se tapi et est prêt à remettre en cause les principes de la République.
    Nadim Ghodbane