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Plusieurs milliers de jeunes contre le CPE à St-Etienne
Marre de toujours plus de précarité !
Alors que les grands groupes capitalistes font des profits records...
mardi 7 février 2006
Comme à chaque manifestation de jeunes, l’ambiance y était, ce matin, dans la grande rue de St-Etienne. 4 000 ? 5000 ? 6 000 ? C’est une forte manif qui est descendue de Bizillon jusqu’à la Préfecture, en s’étoffant au fur et à mesure du parcours. Composée aux deux tiers environ de lycéens et d’étudiants de l’agglomération, et aussi de salariés présents à l’appel des organisations syndicales (notamment la cgt, mais également la cfdt, sud, la fsu, la cnt...)
Une manif de colère. "Contrat de première embauche", le CPE ? C’est ce que prétend le gouvernement qui le présente comme "le contrat qui va enfin permettre aux jeunes - dont près d’1/4 sont aujourd’hui sans emploi et qui mettent en moyenne plus de 10 ans (quand ils y arrivent) à trouver un emploi un peu plus stable - de trouver un boulot. Ainsi une nouvelle fois, les partisans du capitalisme néolibéral cherchent à s’appuyer sur les ravages de leur système pour en remettre une couche.
Ce matin, des jeunes avaient écrit sur leurs banderolles différentes significations qu’ils lisent dans "CPE" : "Contrat Pour exploiter", "Contrat Premiers Emmerdes", "Contrat Poubelle Embauche", "Créé Pour Exploiter", "Contrat Première Exploitation"...etc.
La précarité est devenue insupportable
Donc, le CPE de Chirac, Villepin, Sarkozy, ça ne passe pas ! Dans toutes les discussions, c’est surtout la précarité toujours croissante imposée aux jeunes qui est rejetée. Une précarité construite brique après brique (au moins 25 dispositifs...) au cours des 25 dernières années, avec cette série incroyable de contrats "spéciaux" pour les jeunes. Les premiers de ces dispositifs ont d’ailleurs été inventés alors que la plupart des manifestants d’aujourd’hui n’étaient pas nés. C’est dire leur efficacité pour régler le problème du chômage !
Cette précarité, elle empêche d’avoir un revenu permettant de vivre dignement, et de construire sa vie avec un peu de sécurité, de faire des projets, d’avoir un logement, de vivre à deux, d’avoir des enfants.
Cette précarité, elle est imprégnée d’un profond mépris de la jeunesse. Avec ce côté main d’oeuvre au rabais. Y compris maintenant quand on a fait de longues études, qu’on a une qualification, des diplômes. Au rabais côté salaires. Au rabais côté "charges patronales", c’est à dire cotisations sociales. A utiliser et à jeter, à remplacer par les suivants encore plus avantageux. Si on rajoute à ça toutes les discriminations selon "l’origine", on aboutit à des vies bridées ou saccagées.
Le CPE, c’est encore une nouvelle étape, vers "la précarité en toute légalité". Car quelle autre justification à cette possibilité donnée d’embaucher avec une période d’essai qui dure 2 ans ? 2 ans pendant lesquels l’employeur peut licencier avec un simple préavis de 15 jours, sans avoir à donner aucun motif. Pour le contrat nouvelle embauche - CNE - l’argument donné a été que c’était limité aux entreprises de moins de 20 salariés, même si on connaît la musique... Mais cette fois-ci, ce sont tous les jeunes, parce qu’ils sont jeunes, qui sont visés. Et quelle que soit la situation des entreprises qui les emploieront.
Si on parlait répartition et utilisation des richesses ?
Presque personne n’en parle, mais ils sont là, ces grands groupes capitalistes qui font depuis des années des profits records et les distribuent à leurs actionnaires.
En 2004, les 40 sociétés du CAC 40 ont réalisé 57 milliards d’euros de profits, établissant ainsi un nouveau record après celui de 46 milliards d’euros en 2000. Mais les toutes récentes estimations sont de 62,5 milliards de profits pour ces mêmes sociétés en 2005, dont plus de 30 milliards d’euros distribués aux actionnaires de ces groupes.
Ce n’est pas parce qu’ils seraient sur la paille que Total, Bouygues, la BNP, Vivendi, la Société Générale, Danone, et les grands groupes de la distribution n’embauchent pas de jeunes ! Et non seulement ils n’embauchent pas, mais ils licencient. Pour eux, tout supplément de précarité et toute baisse de cotisations sociales ne signifie pas plus d’emplois mais plus de profits.
Et en plus, les impôts sur les revenus et la richesse - qui permettraient de payer ces centaines de milliers d’emplois indispensables à un meilleur fonctionnement de la société - ne cessent de baisser...
"Chirac, Villepin, ta loi elle craint" scandaient ce matin des jeunes dans le cortège. Normalement, la loi devrait protéger les personnes et établir des règles permettant une vie digne pour tous dans la société. Avec les politiques capitalistes néo-libérales qui se succèdent depuis 25 ans, et qui se déploient sans limites aujourd’hui avec Chirac, Sarkozy et Villepin, la loi se réduit comme peau de chagrin pour tout ce qui est égalité, justice, droits sociaux. Et elle s’étend comme un cancer pour tout ce qui est sécuritaire et limitation des libertés. Reconstruire des règles plus justes de fonctionnement de la société : la loi, ça doit servir à ça.
Alors monte ce refus qui pourrait bien prendre de l’ampleur dans les prochains temps. La précarité comme mode "normal" de vie, ce n’est pas une vie ! Il est nécessaire d’inventer autre chose. Pourquoi ne serait-il pas possible que chacun ait pour son travail un revenu permettant de vivre dignement et de construire sa vie avec une certaine sécurité ?
Pourquoi ne reconstruirait-on pas des solidarités. Par exemple avec ces millions de jeunes sans emploi et précaires que nous côtoyons tous les jours ?
Photographies : Marie-Pierre Vincent.
Messages
1. Le Contrat Précaire d’Embauche, 8 février 2006, 09:17
Le CPE (mensongèrement appelé "contrat de première embauche", puisque jusqu’à 26 ans les jeunes pourront "enfiler" des CPE, des stages, des CDD...), est un peu une extension à tous les jeunes et à toutes les entreprises (surtout celles de plus de 20 salariés) du CNE - "Contrat Nouvelle Embauche" institué en août 2005.
Le CNE est un contrat à durée indéterminée réservé aux entreprises de moins de 20 salariés, qui a institué une « période d’essai » de 2 ans pendant laquelle l’employé peut être licencié sans motif et sans indemnité.
Avec le CPE, cette formule est en gros étendue :
à tous les jeunes de moins de 26 ans
à toutes les entreprises de plus de 20 salariés !
La période d’essai est de 2 ans, pendant laquelle l’employeur peut licencier le jeune à tout moment (15 jours de préavis) sans avoir à donner aucun motif. Dans la novlangue gouvernementale, cette période de précarité totale est appelée "période de consolidation" !
En cas de rupture du CPE après 4 mois de travail, chaque jeune aurait droit, en plus de l’indemnité de rupture (correspondant à 8% de l’ensemble des sommes perçues depuis le début du contrat, versée par l’employeur), à une allocation forfaitaire d’un montant mensuel de 460 euros, financée par l’Etat, et versée pendant 2 mois.
D’autre part, les entreprises pourront bénéficier d’une exonération totale de "charges patronales" pendant trois ans en cas d’embauche de jeunes de moins de 26 ans au chômage depuis plus de six mois.