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Parce que nous refusons l’enfermement des étrangers

2000 manifestants avec RESF devant le CRA de Lyon-St-Exupéry. Nombreux rassemblements dans les régions de France

mercredi 23 janvier 2008

Entre 1500 et 2000 personnes - dont au moins 150 de la Loire - ont manifesté samedi 19 janvier au centre de rétention administrative (CRA) de Lyon Saint-Exupéry, à l’initiative des RESF de la région Rhône-Alpes et des départements voisins ayant directement affaire à cette prison pour étrangers.





Le même jour des manifestations ont eu lieu dans d’autres régions devant les centres de rétention, et des initiatives aussi dans d’autres pays d’Europe, ce 19 janvier étant une journée européenne d’actions contre l’enfermement des sans-papiers, comme l’a rappelé à Lyon Mireille Peloux, de RESF-rhône.

On peut voir sur le site internet de RESF un tour de France des mobilisations du 19 janvier à travers les journaux télévisés de FR3 :
http://www.educationsansfrontieres.org/?article11183.

C’est vraiment impressionnant. Des manifestations ont eu lieu à Bordeaux, Rennes (environ 1500 personnes), Rouen et Oissel, Orléans, Besançon, Nimes, Sète (un millier de manifestants), Metz, Toulouse. (300 personnes), Paris (3 000 manifestants, dont Maurice Rajsfus), Mesnil-Amelot en Seine et Marne, Nantes (400 personnes), Marseille (500 manifestants)...
C’est une prise de conscience qui est en cours. Le tour des centres de rétention montre qu’on a bien affaire à une politique organisée sur le long terme en France (24 centres en métropole, 2en outre-mer, une durée autorisée de rétention qui est passée de 7 jours en 1981 à 32 jours aujourd’hui ; plus de 200 enfants enfermés en 2007...). On voit la montée de la colère contre la politique des quotas, l’exigence de plus en plus souvent exprimée de fermeture des centres de rétention, on voit aussi toute la force du réseau RESF, son ancrage dans le pays.





Partout en Europe on a affaire à la montée d’une politique d’expulsion des étrangers dont plus de 30 000 sont actuellement enfermés. Une politique qui se coordonne et “s’industrialise”, ainsi que le dit la Cimade, et ainsi que le montre la “circulaire de la honte” en préparation au niveau de l’Union européenne pour être votée par le Parlement européen en mai 2008. Cette circulaire instaurerait un ensemble de règles draconiennes applicables par tous les pays européens (durée possible de “rétention” c’est à dire d’emprisonnement des étrangers portée à 6 mois - d’autres disent 18 mois -, interdiction de rentrer en Europe pendant 5 ans pour les personnes expulsées etc...) (voir : Europe, janvier 2008 : Non à la directive de la honte !). L’Europe se transforme en forteresse pendant que la mondialisation économique capitaliste qu’elle participe à imposer ravage les économies des pays du Sud et pousse à l’exode.

En France, Sarkozy et Hortefeux on annoncé un objectif de 26 000 expulsions en 2008. RESF estime à 2 400 personnes, dont de plus en plus d’enfants, le nombre actuel d’enfermés dans les 24 CRA. Cette politique inhumaine rappelle les heures sombres de notre histoire. Ce que dénonçait cette femme qui traversait le rassemblement samedi en criant “Papon, démission !”, alors que là-bas, à 200 mètres, derrière les grillages et les barbelés ont voyait des bras agiter des draps et des foulards derrière les barreaux des fenêtres. Il faut relire à ce sujet ce qu’écrivait en octobre 2006 Emmanuel Terray : “1942-2006 : réflexions sur un parallèle contesté”


Malheureusement, les choses ne sont pas en train de s’arranger. Mais pour y faire face, la mobilisation grandit elle aussi.
Devant le centre de rétention de Lyon, une manifestation de protestation avait déjà eu lieu en octobre 2006. Mais samedi, nous étions trois fois plus nombreux. Et en plus des 8 département de Rhône-Alpes (Rhône, Loire, Isère, Drôme, Ardèche, Savoie, Haute-Savoie, Ain), des manifestants étaient venus aussi du Cantal, du Puy de Dôme, de la Côte d’Or, de la Haute-Loire...
Côté policier aussi, on était passé à une autre échelle : probablement pas loin de 200 gendarmes, avec tout l’équipement, des gendarmes nombreux aussi à l’intérieur du centre de rétention, et qui paraissaient se démener, là-bas, pour faire taire les signes des étrangers emprisonnés.

Les lieux ont changé depuis fin 2006. Le centre semble avoir été agrandi, et les grillages et rangées de barbelés ont grandi aussi et se sont multipliés. De loin - car cette fois on n’a pas pu s’approcher, des barrières étaient installées très en avant du centre, et gardées par les gendarmes - on voit même que des barbelés ont été installés pour empêcher tout accès aux toits des bâtiments du centre. Pour empêcher que des enfermés en appellent au ciel, sans doute.
C’est bien un camp qu’on a devant nous. C’est vrai qu’on n’y tue pas des humains. Mais on en envoie dans des endroits où la mort attend certains d’entre eux, certains de ceux-là même qui ont échappé à la noyade ou à la mort de faim et de soif en méditerranée, ou aux fusils à Ceuta et Melilla et ailleurs.

Au fur et à mesure de l’arrivée des cars (au moins une dizaine, dont deux de la Loire) et de centaines de voitures, le rassemblement a grossi et crié sa colère. Et bien sûr, les enfermés ont entendu, et répondu aux appels et des tissus blancs et des foulards sont apparus aux fenêtres. C’était très émouvant ce moment là, des hommes, des femmes qui nous font signe, eux qui n’ont rien fait de mal et sont enfermés là-bas derrière des barbelés pour être expulsés, avec des militaires qui empêchent de les approcher, et alors que les avions de Satolas décollent régulièrement quelques centaines de mètres plus loin. On voyait des gendarmes faire les cent pas pour les faire taire, et on devinait ce qui pouvait se passer dedans.

Pendant longtemps, les manifestants ont crié leur colère et leur solidarité : “les enfants à l’école, pas en prison !”, “Libérez les sans papiers !”, “c’est pas les immigrés, c’est pas les sans papiers, c’est Hortefeux qu’il faut virer”, “1ère, 2ème, 3ème génération : nous sommes tous des enfants d’immigrés !”, “sans papiers expulsés, sans papiers assassinés”, “solidarité avec les sans papiers”, “non non non aux expulsions. Régularisation de tous les sans papiers”...
Lu sur les banderoles : “Stop aux rafles”, “Des droits égaux pour tous !”, “Fermeture des centres de rétention”, “Avec nous dans la vi(ll)e”...
Sur un grand tissu posé par terre, on pouvait écrire. Et des mains ont inscrit : “Les hommes naissent libres et égaux”, “liberté de circulation pour tous, pas seulement sur le papier”, “Fichiez leur la paix”, “Ne nous laissez pas seuls avec les français”, “Pour la mondialisation des humains”, “Comment un pays qui refuse ses semblables peut-il se regarder en face ?”...etc.

Une délégation d’élus, députés et maires, est rentrée dans le centre de rétention, sous des applaudissements. Parce que ça fait plaisir de voir des élus avec leur écharpe tricolore être présents dans cette manifestation, et se diriger et entrer dans le centre de rétention. Ce sont des élus de gauche, et évidemment ce ne sont pas ceux qui étaient là qui sont à critiquer, surtout qu’ils ne sont pas si nombreux que ça à se mouiller. On gardera quand même en tête, pour la suite des choses, que la gauche au gouvernement n’a pas fermé ces centres, au contraire. Et on exigera donc un peu plus fort qu’il soit fait autrement pour la suite. Ce qu’une voix exprimait à sa manière dans un mégaphone : “les parlementaires de la République s’avancent et vont obtenir le démantèlement des centres de rétention”... La prochaine fois que vous aurez le manche, Messieurs, il faudra ouvrir des écoles et fermer ça.

750 euros ont été collectés dans les deux cars RESF de la Loire, ce qui permet de couvrir le coût du transport.

Voir une vidéo de Marie-Pierre Vincent sur la manifestation de Lyon St-Exupéry.





Le 14 janvier a été rendu le délibéré du jugement de François Auguste , vice-président de la région
Rhône-Alpes. Il a été condamné à 500€ avec sursis pour "tentative
d’entrave à la circulation d’un aéronef"
( !). Il avait pris la parole dans un avion lors de l’expulsion d’une famille Kosovar. Il est condamné pour avoir « eu l’intention » d’empêcher l’avion de décoller !
Il en faudra plus pour intimider celles et ceux qui avec RESF luttent contre les expulsions des sans papiers.




Photos transmises par Marie-Pierre Vincent, Jacqueline Rival, Pierre Bonnefoy, Jérôme Depp.