Mon site SPIP

Accueil > Collectif Liberté Justice Palestine > Israel’s righteous fury and its victims in Gaza

Ilan Pappé appelle à affronter l’idéologie sioniste, qui nourrit la politique israélienne.

Israel’s righteous fury and its victims in Gaza

Ce dont il y a besoin maintenant, ce n’est pas seulement d’une condamnation du massacre en cours, c’est aussi d’une délégitimisation de l’idéologie qui produit cette politique et la justifie moralement et politiquement.

mardi 6 janvier 2009

Ce texte est publié sur le site Electronic Intifada
Et également sur le site d’Ilan Pappé

La traduction ci-dessous est malheureusement approximative (par exemple comment traduire “righteous fury” ? par "juste fureur" ?...). Si quelqu’un peut aider à améliorer la traduction...
Celles et ceux qui lisent l’anglais peuvent se reporter au texte original sur les sites Electronic Intifada et d’Ilan Pappé

Historien israélien, enseignant à l’Université d’Haifa, Ilan Pappe a du quitter Israël début 2007, ne pouvant plus y poursuivre son travail. Il enseigne aujourd’hui l’histoire à l’Université d’Exeter (Grande-Bretagne)...

Mon retour au pays, en Galilée, a coïncidé avec l’attaque génocidaire d’Israël sur Gaza. L’Etat, par le biais de ses media et avec l’aide de milieux universitaires, a diffusé une parole unanime - presque plus forte que lors de l’attaque criminelle contre le Liban à l’été 2006. Une fois de plus, Israël s’est engouffré avec une "juste fureur" qui s’est traduite dans sa politique de destruction dans la Bande de Gaza. Cette épouvantable auto-justification qu’Israël se donne pour ses actes inhumains et son impunité n’est pas seulement ennuyeuse... c’est un sujet sur lequel il faut s’arrêter, si l’on veut comprendre l’immunité internationale qui est accordée à Israël pour ce massacre qui fait rage à Gaza.

Tout ceci repose principalement et d’abord sur de purs mensonges transmis par des informations sur un ton rappelant les jours sombres de l’Europe de 1930. Toutes les demi-heures, un bulletin d’information à la radio et à la télévision décrit les victimes de Gaza comme des terroristes, et leur assassinat massif par Israël comme un acte d’auto-défense. Israel se présente à ses citoyens comme la victime pure qui se défend contre un grand Satan. Le monde universitaire est recruté pour expliquer à quel point le combat palestinien est démoniaque et monstrueux, s’il est mené par le Hamas. Ce sont les mêmes érudits qui avaient démonisé le dernier leader palestinien, Yasser Arafat, dans d’autres temps, et avaient fait en sorte de délégitimer son mouvement le Fatah pendant la seconde Intifada palestinienne.

Mais les mensonges et les représentations distordues ne sont pas le pire. Ce qui est le plus rageant, c’est cette attaque directe menée contre ce qui restait d’humanité et de dignité dans le peuple palestinien. Les Palestiniens israéliens ont montré leur solidarité avec le peuple de Gaza et maintenant on les considère comme la 5e colonne de l’état Juif. Leur droit de rester dans leur pays est mis en doute en raison de leur manque de soutien à l’agression israélienne. Ceux d’entre eux qui acceptent - à tort selon moi - de passer dans les media locaux, sont interrogés, et non pas interviewés, comme s’ils étaient détenus dans la prison du Shin Bet. Leur passage à l’antenne est précédé et suivi de remarques racistes humiliantes et ils sont accusés d’être une 5e colonne, un peuple irrationnel et fanatique. Et encore, ce n’est pas le pire. Il existe un petit nombre d’enfants palestiniens des territoires occupés qui sont traités contre le cancer dans des hôpitaux israéliens. Dieu sait quel prix ont du payer leurs familles pour que ces enfants puissent être soignés. La radio israélienne va tous les jours à l’hôpital demander aux pauvres parents de dire aux auditeurs israéliens combien Israël a raison d’attaquer et combien le Hamas a tort de se défendre.

Il n’y a pas de limites à l’hypocrisie que cette "juste fureur" produit. Les discours des généraux et des politiciens oscillent entre d’un côté l’autosatisfaction et les louanges à l’humanité de cette armée pour ses opérations “chirurgicales” et la nécessité de détruire Gaza une fois pour toutes - mais de façon humaine bien sûr - de l’autre.

Cette "juste fureur" a toujours été une tendance constante de la dépossession israélienne - et avant tout sioniste - de la Palestine. Chaque acte, qu’il soit de nettoyage ethnique, d’occupation, de massacre ou de destruction, a toujours été dépeint comme un acte juste moralement et comme de la pure auto-défense, qu’Israël était hélas obligé de pratiquer dans sa guerre contre la pire espèce d’êtres humains. Dans son excellent livre "Le retour du sionisme, mythes, politiques et études en Israël", Gabi Piterberg explore les origines idéologiques et l’histoire de cette "juste fureur". Aujourd’hui, en Israël, de la gauche à la droite, du Likoud à Kadima, de l’université aux média, on peut entendre cette "juste fureur" d’un Etat plus occupé que n’importe quel autre au monde à détruire et à dépouiller une population autochtone.

Il est crucial d’explorer les origines idéologiques de cette attitude et de tirer les conclusions politiques de sa prédominance. Cette "juste fureur" protège la société et les politiciens israéliens du moindre blâme ou de la moindre critique de l’extérieur. Mais le pire, c’est qu’elle s’est toujours traduite en politiques destructrices contre les Palestiniens. En l’absence de mécanisme interne de critique et en l’absence de toute pression extérieure, chaque Palestinien devient une cible potentielle de cette fureur. Compte tenu de la puissance de feu de l’État Juif, cela ne peut finir qu’en plus d’assassinats massifs, de massacres et de nettoyage ethnique.

L’auto-justification est un puissant moyen de déni et de justification. Cela explique pourquoi la société juive israélienne ne pourrait pas être touchée par des discours de sagesse, de raisonnement, ou de dialogue diplomatique. Et si on ne choisit pas la violence comme moyen de s’y opposer, il n’y a qu’un seul chemin : combattre cette "juste fureur" comme une idéologie néfaste destinée à couvrir des atrocités. L’autre nom de cette idéologie est le Sionisme, et une condamnation internationale du sionisme, pas seulement pour la politique israélienne, est le seul moyen de résister à cette auto(?). Nous devons essayer d’expliquer non seulement au monde, mais aussi aux Israéliens eux-mêmes, que le sionisme est une idéologie qui couvre le nettoyage ethnique, l’occupation et maintenant les massacres massifs. Ce dont il y a besoin maintenant, ce n’est pas seulement d’une condamnation du massacre en cours, c’est aussi d’une délégitimisation de l’idéologie qui produit cette politique et la justifie moralement et politiquement. Espérons que des voix qui comptent dans le monde diront à l’Etat Juif que cette idéologie et le comportement général de cet Etat sont intolérables et inacceptables, et que tant qu’ils persisteront, Israël sera boycotté et soumis à des sanctions.

Mais je ne suis pas naïf, je sais que même l’assassinat de centaines de Palestiniens innocents ne suffirait pas pour provoquer un tel changement dans l’opinion publique occidentale. Il est encore plus improbable que les crimes commis dans la bande de Gaza puissent amener les gouvernements européens à changer leur politique à l’égard de la Palestine.

Et pourtant, nous ne pouvons pas nous permettre que 2009 soit juste une année de plus, encore moins importante que 2008, année anniversaire de la Naqba qui n’a pas été à la hauteur des grands espoirs que nous avions qu’elle soit l’occasion de transformer radicalement l’attitude du monde occidental envers la Palestine et les Palestiniens.

Il semble que même les crimes les plus horribles, comme le génocide dans la bande de Gaza, sont traités comme des événements ordinaires, sans lien avec ce qui advint dans le passé, et sans que cela soit mis en rapport avec une quelconque idéologie ou un quelconque système. En cette nouvelle année, nous devons essayer d’éveiller l’opinion publique à l’histoire de la Palestine et aux méfaits de l’idéologie sioniste, ce sont les meilleurs moyens d’expliquer les opérations de génocide telles que celle qui est en cours à Gaza, et d’anticiper le pire qui est à venir.

Dans les milieux universitaires, cela a toujours été fait. Notre principal défi actuel est de trouver un moyen efficace de montrer la continuité entre l’idéologie sioniste et les politiques précédentes de destruction, et la crise actuelle. Il devrait être plus facile de le faire alors que, dans les terribles circonstances actuelles, l’attention du monde est attirée une fois de plus sur la Palestine. Cela serait encore plus difficile lorsque la situation semble “plus calme” et moins dramatique. Dans de tels moments plus calmes, la faible attention des média occidentaux marginalisera une fois de plus la tragédie Palestinienne et la négligera, soit à cause des horribles génocides en Afrique, ou de la crise économique et des scénarios écologiques apocalyptiques dans le reste du monde.Alors que les médias occidentaux ne semblent pas intéressés par le rappel du passé, ce n’est qu’à travers une analyse historique que l’ampleur des crimes commis contre le peuple palestinien tout au long de ces 60 dernières années peut être comprise. Par conséquent, c’est la responsabilité d’un intellectuel et d’un média alternatif d’insister sur ce contexte historique. Ils ne devraient pas négliger d’éduquer l’opinion publique et, espérons-le même, d’amener les plus consciencieux des hommes politiques à voir les événements dans une perspective historique plus large.

De même, nous pourrions être capables de trouver une manière simple, différente de celle des sphères universitaires, d’expliquer clairement que la politique d’Israël - dans les 60 dernières années - découle d’une idéologie raciste hégémonique appelée sionisme, recouverte par une infinité de couches de "juste fureur". En dépit de l’accusation d’antisémitisme dont vous serez l’objet, il est temps d’associer dans l’esprit du public l’idéologie sioniste avec les repères historiques désormais familiers de ce pays : le nettoyage ethnique de 1948, l’oppression des Palestiniens en Israël sous le régime militaire, l’occupation brutale de la Cisjordanie et maintenant le massacre de Gaza. Tout comme l’idéologie de l’Apartheid a expliqué la politique d’oppression du gouvernement sud-africain, cette idéologie - dans ses formes les plus consensuelles et les plus simplistes - a permis à tous les gouvernements, du passé et du présent, de déshumaniser les Palestiniens, où qu’ils se trouvent et de s’efforcer de les détruire. Les moyens changèrent selon le moment, selon le lieu, de même que la manière de raconter et de couvrir ces atrocités. Mais il existe une tendance lourde qui ne peut pas faire seulement l’objet de discussions dans les tours d’ivoire universitaires, mais doit faire partie du discours politique sur la réalité de la Palestine aujourd’hui.

Sans vouloir s’y soustraire, certains d’entre nous, notamment ceux qui sont attachés à la justice et la paix en Palestine, évitent ce débat en se concentrant, et c’est compréhensible, sur les territoires palestiniens occupés (TPO) - la Cisjordanie et la bande de Gaza. Lutter contre la politique criminelle est une tâche urgente. Mais cela ne doit pas avaliser le message que les puissances occidentales ont adopté avec joie sur un signal israélien : que la Palestine c’est uniquement la Cisjordanie et la bande de Gaza, et que les Palestiniens ne sont que les gens qui vivent dans ces territoires. Nous devrions élargir la représentation de la Palestine géographiquement et démographiquement en racontant l’histoire des événements de 1948 et, depuis 1948, et demander l’égalité des droits humains et civiques pour toutes les personnes qui vivent, ou ont vécu, dans ce qui est aujourd’hui Israël et les Territoires Palestiniens Occupés.

En faisant le lien entre l’idéologie sioniste, les politiques israéliennes passées et les atrocités d’aujourd’hui, nous devrions pouvoir donner une explication claire et logique pour une campagne de boycott, d’isolement et de sanctions. Défier par des moyens non-violents un Etat bourré de certitudes idéologiques qui se permet, aidé par une communauté internationale sourde, de déposséder et de détruire le peuple autochtone de Palestine, est une cause juste et morale. C’est aussi un moyen efficace non seulement de mobiliser l’opinion publique contre le génocide actuel dans la bande de Gaza, mais on peut l’espérer, d’éviter aussi de nouvelles atrocités. Mais, plus important que tout, cela permettrait de crever le ballon de cette "juste fureur" qui étouffe les Palestiniens chaque fois qu’il gonfle. Cela aiderait à en finir avec la garantie occidentale à l’impunité d’Israël. Sans cette garantie, on peut espérer que de plus en plus de gens en Israël commenceraient à voir la vraie nature des crimes commis en leur nom et leur colère serait dirigée contre ceux qui les ont piégés, ainsi que les Palestiniens, dans ce cycle de sang et de violence inutiles.

Ilan Pappé
2 janvier 2009

Ilan Pappé a publié en 2008= "Le nettoyage ethnique de la Palestine”
voir : http://www.reseauxcitoyens-st-etienne.org


Concernant l’avenir possible en Israël/Palestine, Ilan Pappé disait en juin 2008 : “Les évènements sur le terrain ont condamné la solution à 2 états depuis bien longtemps. Les faits ont démontré qu’Israël n’a et n’aura jamais la volonté de laisser naître un Etat palestinien autre qu’un Etat apatride fait de deux bantoustans en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza sous un total contrôle israélien.
Il existe déjà un Etat et le défi est d’en changer sa nature et son régime. Que le nouveau régime et la base constitutionnelle soient bi-nationaux ou démocratiques voire les deux n’est pas si élémentaire à cet égard. Tout contexte politique qui pourrait remplacer la conjoncture raciste est la bienvenue. Et une telle situation devrait également permettre le retour des réfugiés et l’installation définitive des émigrés les plus récents.”