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“L’ouverture d’une enquête contre Israël pour crimes contre l’humanité est probable”

A St-Etienne, Gilles Devers, avocat, a fait le point sur la plainte déposée auprès du Procureur de la CPI-Cour Pénale Internationale.

lundi 30 mars 2009

Environ 120 personnes - dont beaucoup de jeunes - ont participé ce dimanche à Montreynaud à la “Journée de la Terre” initiée par le collectif “Justice et Liberté pour la Palestine” / “Horiya wa Adala Li Falestine” . (Voir le programme). Nous en reparlerons...
Dans le programme de l’après-midi, l’intervention de Gilles Devers, avocat au barreau de Lyon, qui a fait le point de la démarche engagée auprès de la CPI-Cour Pénale Internationale, pour que soient jugés les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis à Gaza.

450 associations et ONG sont aujourd’hui signataires de la plainte qui a été déposée le 22 janvier auprès du Procureur de la CPI, l’argentin M. Luis Moreno ?Ocampo.
(voir : Une plainte pour crimes de guerre commis sur la terre palestinienne de Gaza-)
Ces associations et ONG sont du monde entier, essentiellement d’Europe, du Moyen-Orient, d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine. A noter que plusieurs associations juives sont signataires de cette plainte, dont deux de Jérusalem. Plus de 40 avocats, dont 8 français, et deux de Gaza même, travaillent sur cette plainte.
A noter aussi qu’il est toujours possible pour une association de rejoindre cette plainte, de s’y associer. L’objectif de tou-te-s est de mettre fin à l’impunité d’Israël.

La CPI a été instituée par un Traité signé à Rome en 1998, pour juger trois types de crimes d’exceptionnelle gravité : les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les génocides. Il fallait ensuite que les Etats ratifient ce traité. Actuellement, 110 Etats l’ont ratifié. A noter qu’Israël et les USA ne l’ont pas ratifié. Pourtant ils ont participé activement aux négociations pour la création de la CPI, et sont intervenus activement pour en limiter les capacités et les moyens, avec promesse de signature si leurs demandes étaient satisfaites. Israël et les USA ont ainsi limité la portée de la CPI, et une fois cette négociation terminée, ont refusé de signer. Une entourloupe. Mais reste que la Cour Pénale Internationale existe quand même, et que telle qu’elle est elle peut juger crimes de guerres, crimes contre l’humanité et génocides.
A ce sujet, il faut distinguer Cour Pénale Internationale et TPI-Tribunal Pénal International dont on a entendu parler à propos de la Yougoslavie, du Rwanda, ou bien du s’assassinat d’Hariri au Liban... Un TPÏ est une instance créée au cas par cas par l’ONU pour juger une affaire particulière quand il est impossible de la juger dans le pays concerné.
La CPI est, elle, une institution de justice internationale permanente.

A noter un black out quasi total depuis deux mois et demi dans les grands médias français autour de la plainte (à part un article dans Libération.fr et un dans L’humanité). Pourquoi ce déni de la réalité ? Apparemment parce que la “ligne” est qu’Israël représente là-bas “les intérêts de l’Occident”, etc... La presse arabe, elle, parle de cette plainte. Il en est question aussi dans la presse US (voir en faisant une recherche avec “Gaz”a et “ICC International Criminal Court”), au Pakistan, en Inde...
Gilles Devers estime qu’aujourd’hui, “l’ouverture d’une enquête contre Israël pour crimes contre l’Humanité est probable”. A cause d’abord de la gravité des crimes commis à Gaza. Il ne s’agit pas d’une guerre, là-bas, mais d’une agression, de massacres contre une population qui était déjà victime d’une violation du droit humanitaire le plus élémentaire (blocus sur la nourriture, sur les médicaments...). Une guerre faite aux enfants et aux civils. La preuve : la destruction ciblée dès les premiers jours de tous les centres de secours (une enquête faite par des Suisses vient de l’établir), le bombardement du 1er jour à 11h30, heure de la sortie des écoles (200 morts), la destruction des stocks de vivres des entrepôts de l’UNWRA (ONU), les 47 enfants massacrés dans une école de l’ONU, les agressions racistes par exemple les inscriptions et dessins laissées sur les murs, les assassinats délibérés, la destruction au bulldozer du tiers des terres cultivées de Gaza... Des cimetières ont même été défoncés au bulldozer, pour bien montrer aux Palestiniens que “même morts, vous ne serez jamais chez vous”. L’enfer sur une population bombardée par terre, par mer et par air sans pouvoir se protéger ni fuir ni se défendre. Une attaque préméditée déclenchée après qu’Israël ait reçu des USA de nouvelles armes, en décembre 2008. Une attaque arrêtée à la veille du discours d’Obama...

Face à ces crimes d’une gravité exceptionnelle, il faut la justice. Et c’est le boulot de la Cour Pénale Internationale.
Cette Cour Pénale Internationale recherche et juge les personnes, pas les Etats. Et pour qu’elle se mette au travail, il faut qu’il lui soit donné “compétence” par un Etat.
Dans le cas où l’Etat n’est pas signataire (et c’est le cas pour Israël), le Conseil de Sécurité de l’ONU peut mandater la CPI (c’est ce qu’il a fait pour le Darfour, suite à quoi la CPI a délivré un mandat d’arrêt pour le président soudanais Bachir), alors même que ce pays n’a pas ratifié le Traité créant la CPI.
Pour ce qui est de Gaza, l’Autorité Palestinienne vient de “donner compétence” à la CPI, et ce avec un consensus de tous les groupes politiques Palestiniens (Fatah, Hamas etc...). Le ministre palestinien concerné est allé à La Haye spécialement. Il faut maintenant que l’Autorité Palestinienne soit reconnue comme jouant le rôle d’un Etat par la CPI, mais cela semble en cours. Car sinon, qui représente les Palestiniens ? Et les Palestiniens, opprimés comme ils le sont, ne pourraient demander justice nulle part ?

Comme indiqué plus haut, le Conseil de Sécurité peut également mandater la CPI pour le jugement des crimes commis à Gaza. Si la question vient à se poser, évidemment la position des Etats Unis va compter. Que va faire Obama devant cette réalité ? Il faut noter que Suzan Rice, nouvelle représentante à l’ONU, vient d’exprimer une évolution de la position des USA sur la CPI en disant qu’elle était un modèle juridique intéressant et qu’il fallait réexaminer le point de vue des États-Unis...

Une autre piste pour enquêter sur les crimes commis par les dirigeants et militaires israéliens est celle des “double-nationaux” mis en cause dans ces crimes. Dans tous les pays, des gens ont une double nationalité. Mais dans le cas d’Israël, 60 à 70% de la population a une double nationalité, et beaucoup ont la nationalité de l’un des 110 pays qui ont ratifié la CPI. Or la CPI vise les personnes qui ont pris part aux crimes. Des plaintes individuelles seront donc déposées, par des familles (françaises et d’autres pays) dont des membres ont été massacrés à Gaza.

En ce moment, la collecte des preuves des crimes (massacres, actes de torture...) continue, et les documents sont transmis à la CPI. La CPI pourrait commencer par enquêter sur ces crimes. Il est donc possible que, pour cela, le Procureur de la CPI décide de saisir prochainement la “chambre préliminaire” qui devrait alors ouvrir une enquête. Compte tenu de la gravité des crimes commis à Gaza, c’est un peu la crédibilité de la CPI qui se joue, là.

Si la démarche en direction de la CPI devait ne pas aboutir, d’autres pistes seront utilisées. En particulier la “compétence universelle”. C’est, en droit, la compétence exercée par un État qui décide de poursuites judiciaires contre les auteurs de certains crimes (génocide, crimes contre l’humanité, torture, certains crimes de guerre, apartheid, esclavage), quel que soit le lieu où le crime a été commis, et sans égard à la nationalité des auteurs ou des victimes. Elle vise à empêcher l’impunité de crimes graves commis dans des régions dont les habitants, citoyens du monde, ne bénéficient pas de protection légale adéquate.
En Espagne et en Norvège par exemple, la Justice s’estime compétente pour juger des faits de génocide et de crimes contre l’humanité commis hors de ces pays, et alors même qu’il n’y aurait pas de victime de ces pays, en vertu du principe de “compétence universelle" qui fait obligation aux Etats de poursuivre les auteurs de crimes contre l’humanité quelle que soit leur nationalité ou celle de leurs victimes.

Tous les moyens doivent donc être utilisés pour que justice soit rendue. Mais il n’y a pas de raison de considérer au départ que la CPI n’a aucune chance d’être saisie et donc qu’elle ne sert à rien. Il est donc curieux que la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) considère que seul le Conseil de sécurité de l’ONU peut ordonner à la CPI d’ouvrir une enquête, comme si l’Autorité Palestinienne n’existait pas, n’avait pas fait une demande à la CPI, et n’avait pas droit à représenter le peuple Palestinien, surtout dans cette circonstance.
De même, la demande auprès de l’ONU de créer un Tribunal spécial pour juger les crimes commis à Gaza revient dans les faits à laisser de côté la possibilité que la CPI se saisisse de ces crimes comme elle devrait le faire si elle assume ses responsabilités.

Il y a aussi eu récemment le lancement d’un “Tribunal Russel” sur la Palestine. Il s’agit d’un tribunal d’opinion. Dans le passé, il y a eu de tels tribunaux (pour le Vietnam, etc...). Bien entendu, cela peut contribuer à faire savoir ce qui s’est passé. Mais maintenant que la CPI existe, le plus important semble quand même de faire condamner Israël pour de vrai, devant la justice internationale, et de mettre réellement en prison les criminels contre l’humanité.

Et c’est bien ce qui semble aujourd’hui possible.

Voir également : http://lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr

Pour information :

Mars 2009 : Radio France Internationale condamnée en Appel pour le licenciement « sans cause réelle ni sérieuse » d’Alain Ménargues

De : Alain Ménargues
Date : Tue, 10 Mar 2009
À : contact@reseauxcitoyens-st-etienne.org
Objet : Vous m’aviez soutenu il y a presque 5 ans, voici la fin de l’histoire.

RFI condamnée en Appel pour le licenciement « sans cause réelle ni sérieuse » d’Alain Ménargues.
En décembre 2004, alors Directeur Général Adjoint pour l’information et les antennes de RFI, Alain Ménargues avait été licencié « pour faute grave » à la suite de la publication de son livre « le Mur de Sharon ».
Durant la promotion de son ouvrage, Alain Ménargues, avait affirmé « qu’Israël est un état raciste ». La phrase avait provoqué une réaction émotionnelle de circonstance chez une poignée de journalistes de RFI. Réaction relayée en externe par des personnes engagées avant d’être reprise par certains syndicats de la radio. Fait exceptionnel, le porte-parole du Ministère des Affaires étrangères avait qualifié les propos d’Alain Ménargues d’ « inacceptables », à la veille d’un déplacement à Tel-Aviv du ministre de l’époque Michel Barnier. Le Président de RFI, Antoine Schwarz, dans la foulée, licenciait son N°2 pour « faute grave et sérieuse » avec mise à pied immédiate, au motif qu’Alain Ménargues, par ses déclarations, avait causé des « troubles importants » au sein de l’entreprise et qu’il avait tenté « de déstabiliser » la direction de sa filiale en langue arabe RMC-mo.
La Cour d’Appel de Paris, dans un arrêt rendu le 6 mars dernier, a estimé que les propos d’Alain Ménargues avaient été émis « dans le cadre de sa liberté d’expression d’auteur, insusceptible de tomber sous le coup du pouvoir disciplinaire de l’employeur. » Quant au « prétendu trouble (..) il s’avère dépourvu de pertinence et doit donc être écarté ». Pour le reste, la Cour a jugé « qu’aucune des fautes invoquées par la société RFI à l’encontre d’Alain Ménargues n’étant établie, (son) licenciement doit être dépourvu de cause réelle et sérieuse ». RFI a été condamnée à verser à son ancien N°2 l’intégralité des droits inhérents à son licenciement, aux indemnités qui lui sont dues pour ses 32 ans d’ancienneté dans l’audiovisuel public et à des dommages et intérêts.

(Voir)