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200 personnes ont participé à la soupe de l’amitié dans le quartier de Beaubrun...

Oui, vivre ensemble

"La bataille contre le terrorisme passera par la bataille pour l’égalité, la justice, la reconnaissance de toute la diversité des citoyens"

samedi 7 mars 2015

"Tous humains, tous différents.... allons à la rencontre de l’autre.... partageons la même soupe.... ! ! ! !". Les associations Terrain d’Entente, Vivre à beaubrun, Globe 42 et les Moyens du Bord invitaient à une soupe de l’amitié ce vendredi 6 Mars à 18h au coeur du quartier, près du Centre social du Babet.
Ce sont près de 200 personnes qui sont venues, pour parler, déguster la chorba et la soupe de légumes fabriquées ensemble dans la journée, pendant que les mômes jouaient dans le terrain tout proche. Le groupe de musique Crêt de folk participait lui aussi à réchauffer l’atmosphère.




Josiane Reymond, de Terrain d’entente, a présenté ainsi le sens de cette rencontre :
"Il nous a fallu tout ce temps non pas pour réagir au drame de Charlie hebdo. Sans hésitation, notre solidarité est allée à tous les journalistes, salariés, policiers, victimes de cette tragédie. Mais aujourd’hui, nous voulons dire que nous refusons qu’au nom de cette tragédie, se développent des propos et des politiques de stigmatisation vis-à-vis de toute une partie des familles des quartiers populaire.

Ce qui nous a également profondément affectés, scandalisés, et beaucoup inquiétés, dans l’affaire de Charlie, c’est la réponse de l’Etat qui a été essentiellement sécuritaire. On croise aujourd’hui des militaires dans les gares, dans les grandes surfaces, dans certains quartiers. Des enfants ont été convoqués au commissariat parce qu’ils disaient qu’ils n’étaient pas Charlie, plusieurs adultes ont été emprisonnés pour les mêmes raisons.

De nombreux indicateurs manifestent un peu partout un profond mal être social qui s’aggrave. Il faut des réponses à la hauteur de la gravité de la situation. Et nous savons tous aujourd’hui ce qui fait le lit de la violence. Une violence qui répond à une autre violence : la pauvreté d’un nombre toujours plus important de familles qui s’aggrave, la désespérance de toutes ces personnes et notamment les jeunes à la recherche d’une formation, d’un emploi et qui se retrouvent dans une véritable impasse, sans perspective d’avenir, ce sont tous ces quartiers oubliés, où les services publics s’amenuisent...

La violence c’est d’abord la discrimination, le traitement inégal dans l’accès aux droits.

Il y a tellement de drames à déplorer aujourd’hui. A St-Etienne, par exemple, durant tout cet hiver, certaines familles, de diverses origines, qui appellent le 115 chaque jour pour trouver un mode d’hébergement sont accueillies dans un gymnase ouvert de 19h à 9h. Durant la journée, c’est la rue, pour des familles avec des enfants, des bébés.
Certains évènements nous heurtent, d’autres nous laissent totalement indifférents. Nous subissons depuis de trop nombreuses années un politique d’exclusion de certains d’entre nos membres.

Et ce n’est pas certaines populations qu’on cherche à opposer aux autres, qui sont le problème. Nos concitoyens de confession musulmane n’ont rien à voir avec ces actes terroristes et c’est une injustice que d’avoir tenté de faire cet amalgame, d’avoir semé le trouble et la confusion.

Nous sommes face à de très graves et très préjudiciables injustices qui se multiplient toujours depuis ces dernières années.

Exclure n’importe quel peuple du creuset national parce qu’il nous serait étranger, c’est violer le principe constitutionnel, qui affirme que notre République ne fait pas de distinction selon l’origine, la race, ou la religion. C’est d’ailleurs le principe de la Laïcité. La laïcité, loin d’une crispation face à l’affirmation des cultes minoritaires, signifie leur reconnaissance. Non pas leur rejet dans l’invisibilité, mais leur droit de cité. La loi de 1905, cette loi de séparation des églises et de l’Etat, était bien plus une loi de libération que d’interdiction ou de répression, libération des citoyens invités à laisser leur querelle confessionnelle pour se concentrer sur la questions des conquêtes démocratiques et sociales. Nous voulons promouvoir une France de la liberté des opinions, de l’égalité des droits et de la fraternité des peuples. Le pluriel plutôt que l’un, le divers plutôt que le même, c’est la première condition de notre devenir.

Les 4 associations qui ont souhaité se rassembler aujourd’hui autour de cette soupe, pour affirmer des valeurs, des principes, sont témoins de tout ce qui nous est donné de vivre, de partager, de construire quand nous savons faire ensemble société. Nous pouvons tous témoigner de l’enrichissement de toutes ces personnes qui viennent de toutes les régions du monde et qui se rencontrent, apprennent les unes des autres.

La France est un pays de toutes les couleurs, toutes ces personnes volontaires venues d’un peu partout, et qui ont offert leur force de travail depuis tellement de générations, ont permis à ce pays d’être ce qu’il est.

C’est dans la reconnaissance des minorités que se joue la vitalité d’une démocratie acceptant la diversité des siens, la pluralité de leur condition, la richesse de leur différence.

Ce que nous croyons séparément importe moins que ce que nous faisons ensemble, nos actions, nos revendications, nos luttes et nos solidarités.

La bataille contre le terrorisme passera par la bataille pour l’égalité, la justice, la reconnaissance de toute la diversité des citoyens, source d’une immense richesse, la bataille contre les discriminations.

Malgré un quotidien éprouvant pour de très nombreuses familles du quartier, où il faut mener une véritable bataille pour tenir, nombreuses sont celles qui arrivent à trouver l’énergie pour construire avec d’autres des solidarités indispensables, elles ont la force et le courage de croire en un avenir possible avec tous. S’unir, agir ensemble plutôt que se laisser diviser. C’est entre nos mains et c’est à vivre concrètement jour après jour."

Josiane Reymond, pour Terrain d’Entente.
Contact : josianereymond@orange.fr