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Le prix du lait, ça ne va pas !

La Confédération paysanne est venue déposer plainte pour non assistance à paysans en danger

Une délégation a été reçue par le Procureur de la République au Palais de Justice de St-Etienne

jeudi 20 juillet 2006

Les paysans veulent des prix rémunérateurs de leur travail. Normal. Surtout quand on voit le décalage avec les prix des produits agricoles dans les rayons des grandes surfaces. Ce mercredi 18 juillet était journée d’action, alors que la Cour d’appel de Montpellier rendait son verdict dans le procès fait par Lactalis à Jean Emile Sanchez, ancien porte-parole de la Confédération, pour une action contre la baisse du prix du lait...

L’avenir des paysans et paysannes est en danger. 30 000 disparaissent par an. Plus de 40% gagnent moins que le Smic et les revenus ont chuté de 13% en 2005.
La Confédération paysanne dénonce "les choix des politiques agricoles qui mènent au désespoir les paysans qui veulent avoir un revenu décent et vivre dignement de leur travail".
Elle le fait parfois avec des actions symboliques. C’est ainsi que fin 2005, pour protester contre les accords de baisse du prix du lait décidés par l’interprofession laitière (2 400 euros de perte de revenu annuel en moyenne par ferme en moins de 4 ans !), la Confédération paysanne a prélevé dans des usines laitières des produits qu’elle a ensuite redistribués dans des quartiers populaires.
A Rodez, 2 000 euros de produits avaient ainsi été prélevés, soit moins que la perte moyenne subie par chaque éleveur en 2004.
Mais ce faisant, les paysans avaient illustré de façon parlante une politique néfaste. Et Lactalis, le 1er groupe laitier en France a décidé de traîner les militants de la Conf en justice. Et pour avoir osé déclarer au président de Lactalis : "si vous ne retirez pas votre plainte, nous bloquerons vos camions", Jean-Emile Sanchez, alors porte-parole, et la Conf, ont fait l’objet d’une plainte supplémentaire.

En première instance, le Tribunal avait relaxé les militants. Mais au procès en appel à Montpellier le 6 juin dernier, l’avocat général avait requis 8 mois de prison ferme contre Jean-Emile Sanchez ! Une requête sous pression politique. Pour preuve, cette réplique du ministre de la justice Clément interpellé par une centaine de paysans de la confédération paysanne le 1er juillet à la Chambre d’Agriculture de la Loire : "8 mois de prison ferme, c’est beaucoup, mais pendant cette période, cela l’empêchera de recommencer"...
Ce qui en dit long sur l’état de la Justice dans notre pays, où règne le 2 poids 2 mesures. Car la société Lactalis est elle-même poursuivie pour fraude massive (plusieurs dizaines de millions d’euros de profit illégal) à la qualité du lait de consommation. Mais pour ce motif, son directeur M. Urion n’est condamné qu’à une peine de 6 mois de prison avec sursis. De même, pour des actions de destruction systématique d’entrepôts de viande bovine par d’autres syndicats en 2001 à Fougères, c’est l’Etat qui est condamné à payer les dégâts (7 millions d’euros)...

Si le verdict de Montpellier est un échec pour ceux qui avaient demandé de lourdes condamnations, il est tout de même injuste. Jean-Emile Sanchez est condamné à une amende de 3 000 euros. 14 autres militants sont condamnés à des amendes de 500 euros et un autre à 150 euros. C’est la relaxe qui s’imposait pour cette action syndicale symbolique et légitime pour la défense du revenu des paysans...

Pas de quoi en tous cas entamer la détermination des paysans qui savent qu’ils posent les bonnes questions : exiger des prix rémunérateurs pour leur travail, défendre le revenu et les emplois dans l’agriculture, résister au système industriel qui se met en place, permettre l’accès à des produits de qualité à toute la société. Au fond, c’est un vrai projet de société, et un autre mode de développement que dessinent ces exigences.
Cette résistance des paysans prend des formes multiples dont l’installation de nouveaux agriculteurs, malgré les difficultés. Ils sont ainsi 160 à 170 à s’installer chaque année dans la Loire, alors que l’on compte hélas 300 départs, dans ce département qui compte environ 4 000 paysans à titre principal. A noter que dans la Loire, 40% des paysans qui s’installent ne sont pas d’origine agricole...

Reçus par le Procureur de la République

Tout cela, une trentaine de militants de la Confédération paysanne (1) sont allés l’expliquer devant le Palais de Justice de St-Etienne, par la voix de Michel Gandhillon, porte-parole de la Conf dans la Loire, André Bouchut, du comité national, Laurent Pinatel, secrétaire départemental. Le Procureur de la République Jacques Pin, a reçu une délégation de 5 personnes : Alice Montaillé, Nicolas Neve, François Pitaval, Jean-Michel Granjon et Laurent Pinatel, qui lui ont expliqué la situation des paysans. Et leur volonté de déposer plainte contre le gouvernement français pour "non-assistance à paysans en danger" ! Le Procureur n’a pas reçu une telle plainte (qui relève de la Haute-Cour), mais il a écouté les explications données, en particulier sur le prix du lait.
A noter qu’au même moment, 25 autres mobilisations se déroulaient en France, en direction des Préfectures, des tribunaux et des usines Lactalis.



Important rendez-vous le 27 octobre à Vienne

A noter aussi qu’une action semblable à celle de Rodez et réunissant une centaine de paysans a eu lieu dans la Loire à l’automne 2005 en direction de l’usine Nestlé d’Andrézieux. Des produits symboliquement "récupérés" avaient alors été redistribués à des familles modestes du quartier du Crêt de Roch à St-Etienne. Nestlé a porté plainte. 25 paysans (propriétaires des voitures dont les numéros avaient été relevés) ont été convoqués et "entendus" pour cette action syndicale dans différentes gendarmeries de la région stéphanoise.
On ignore la suite que le Procureur donnera à cette plainte. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ont ainsi mis sur la table des problèmes que l’on ne résoudra pas en envoyant des paysans en prison...

Et le 27 octobre, Jean-Emile Sanchez comparaîtra devant le Tribunal de Vienne (38), toujours en qualité d’ex porte-parole de la Conf. Là, c’est Danone qui veut se faire rembourser "ses" yaourths fabriqués avec un lait qu’il paie de moins en moins correctement.
Ce 27 octobre sera une journée de mobilisation dans toute la région. Rendez-vous est d’ores et déjà donné, en attendant les précisions.
La Conf va fêter ses 20 ans en 2007. Bien décidée à continuer son travail pour "permettre aux paysans de se réapproprier leur avenir".


(1) étaient présents aussi des membres des Faucheurs volontaires et des Réseaux citoyens de st-étienne.