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Collectif Liberté Justice Palestine

Rencontre autour du film “Les panthères noires d’Israël parlent”, d’Elie Hamo & Sami Shalom Chetrit

Mardi 20 décembre à 20h, au cinéma Le France

lundi 12 décembre 2011, par Roger Dubien

Eyal Sivan nous a parlé plusieurs fois de ce film, qui raconte une histoire dont on n’entend jamais parler ici : la révolte des jeunes Juifs maghrébins en Israël, dans les années 70. Les fils de "Misrahi”, ces juifs des pays arabes que le sionisme avait amené en Israël, et qui ont été traités en citoyens de 2ème zone, parce que s’ils étaient juifs, ils étaient aussi arabes, aux yeux de ceux qui dirigeaient Israël. Qu’ils étaient amenés pour faire du nombre et faire les boulots difficiles, et mettre en face des Palestiniens. Mais qu’ils devaient être utilisés et “désarabisés”.

Le film de Elie Hamo & Sami Shalom Chetrit raconte une partie de leur histoire. Il a été tourné en 2003, dure 53 minutes, est en hébreu sous-titré en français.

“En 1971, dans le quartier Mousrara de Jérusalem (ancien quartier palestinien, surtout habité par des familles juives arabes) quelques jeunes Israéliens issus de la deuxième génération d’immigrés du Maghreb lancent le Mouvement des Panthères Noires d’Israël.
La société israélienne est alors divisée entre les Ashkénazes, Juifs d’origine européenne, qui dominent la vie politique et économique, et les Mizrahis, Juifs principalement originaires du Maghreb, qui fournissent une main d’œuvre bon marché.
Les Panthères Noires d’Israël lient leurs actions à celles des droits civiques aux Etats-Unis, aux mouvements marxistes des pays du Tiers-Monde et, pour la première fois en Israël, à la résistance palestinienne.
Le succès du soulèvement des Panthères Noires d’Israël oblige les Israéliens à ouvrir les yeux sur les injustices dont sont victimes les Mizrahis. Il provoque aussi un réveil de la conscience culturelle juive arabe, qui perdure encore aujourd’hui.
Aujourd’hui, les Panthères Noires d’Israël n’existent plus en tant que mouvement politique. Mais les anciens dirigeants se souviennent et nous racontent comment leur révolution est née, comment elle a disparue et quelles traces en subsistent encore.”


Qui étaient ces jeunes qui ont créé les Panthères Noires. Que sont-ils devenus, qu’est devenu ce mouvement ?
En 2007, Michel Warschawski rendait hommage à Saadia Marziano, juif d’une famille marocaine, l’un des fondateurs des Panthères noires d’Israël, au moment de sa mort.
Lire, sur le site des Missions civiles : Une vraie Panthère : Saadia Marziano.
Saadia Marziano qui n’a jamais abandonné ni trahi ses engagements de jeunesse.

On évoquera aussi d’autres belles figures de ce mouvement, comme celle de Reuven Abergel, juif israélien d’origine marocaine lui aussi, qui continue le combat, à Jérusalem même, notamment au sein du mouvement TARABUT-HITRABUT (« rassembler / associer » en arabe et hébreu)
Reuven Abergel qui a participé début 2009, au moment de la guerre contre Gaza, à créer le réseau international juif anti-sioniste (IJAN), qui a appelé à "affronter le sionisme et à isoler et à sanctionner Israël".

Voici des vidéos d’une interview récente de Reuven Abergel

Un livre à lire, publié par les Editions La Fabrique :

Ella Shohat - Le sionisme du point de vue de ses victimes juives : Les juifs orientaux en Israël

Ce texte fondateur d’Ella Shohat, écrit en 1986 et traduit ici pour la première fois en français, s’attache à retracer les origines historiques de " l’opression structurelle que subissent les juifs orientaux en Israël ", et à dévoiler les mécanismes et les discours qui la perpétuent. Revenant sur les prémisses du sionisme, idéologie euro-centrée à caractère orientaliste et colonial, l’auteur montre comment l’action de la minorité ashkénaze à la tête de l’Etat hébreux a abouti, au terme d’un travail systématique de dévalorisation des traits culturels orientaux, à rendre impensable en Israël toute représentation indépendante de la population juive d’Orient. De plus, " en incitant les juifs orientaux à haïr les arabes et à rejeter leur propre culture ", l’Etat sioniste a compromis les bases mêmes d’une entente entre juifs et Palestiniens dans la région.

Biographie de l’auteur
Ella Shohat est professeur à l’université de New York. Elle a publié de nombreux ouvrages et articles sur le postcolonialisme et notamment sur les rapports entre les concepts d’Arabe, de juif et de juif oriental.

Editeur : La Fabrique éditions
Traduction Isabelle Taudière
ISBN-10 : 2913372597 - ISBN-13 : 978-2913372597

Les Panthères Noires Israéliennes

Les Panthères Noires Israéliennes (en hébreu : הפנתרים השחורים, HaPanterim HaSh’horim) est un mouvement de protestation sociale contre le traitement des Juifs mizrahim (orientaux), fondé par Reuven Abergel, originaire du Maroc et Saadia Marciano issu de la deuxième génération des olim (immigrants juifs), sur le modèle du groupe afro-américain des Black Panthers. Le mouvement débuta en 1971 à Mosrara, à côté de Jérusalem, en se défendant contre le racisme et la discrimination continuelle conduits par les autorités israéliennes envers les Juifs Mizrahi (orientaux). Cette révolte se fit tout en faisant le lien avec l’oppression des Palestiniens, Reuven Abergel se présente (encore aujourd’hui) comme un militant anticolonialiste et antisioniste. Pour ceux qui en doutaient, il existe bel et bien une hiérarchie implicite dans la société israélienne : au dessus de l’échelle sociale, il y a l’Establishment ashkénaze, ensuite viennent les olim originaires d’Union soviétique et enfin viennent les Mizrahi (et les Falachas) ainsi que les Palestiniens.
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Lire sur le site des Editions La Fabrique : http://atheles.org/lafabrique/livres :

Ella Shohat
Le Sionisme du point de vue de ses victimes juives
Les juifs orientaux en Israël

Ella Shohat est née et a grandi en Israël dans une famille de Juifs irakiens originaires de Bagdad qui avaient quitté leur pays dans les années 1950. « En tant qu’Arabe juive, écrit-elle, je suis souvent amenée à expliquer les “mystères” de cette entité antinomique. Expliquer que nous parlions l’arabe et pas le yiddish, que pendant des millénaires, notre culture, comme notre créativité profane ou religieuse s’est largement exprimée en arabe. » Elle est une figure emblématique des intellectuels et militants orientaux de la deuxième génération - celle née en Israël après l’immigration massive de Juifs du Maghreb et du Moyen-Orient dans les années 1950-1960 - qui développèrent à partir de la fin des années 1980 une critique radicale du sionisme et de la société israélienne façonnée par les ashkénases (Juifs d’Europe).

Dans les années 1950-1960, en réaction à l’hégémonie ashkénase, des mouvements de protestation et de résistance orientaux émergent en Israël. Le plus célèbre fut celui des Panthères noires d’Israël, composé essentiellement de jeunes maghrébins juifs issus des quartiers et des cités populaires de Jérusalem. D’abord réprimées par les autorités israéliennes, puis récupérées par des groupes d’extrême gauche ou le parti communiste, et finalement écartées de la société israélienne, les Panthères noires - malgré leur brève existence - demeurent une référence pour les jeunes orientaux.

Il faut attendre les années 1980 pour voir apparaître en même temps que le Shas (parti religieux des Juifs orientaux) une critique intellectuelle laïque chez les Orientaux. Le titre de l’article d’Ella Shohat, « Le sionisme vu par ses victimes juives », en résume la teneur. Écrit en 1988, il fut publié pour la première fois en ouverture du numéro spécial de Social Text consacré au débat colonial. Traduit ici pour la première fois en français, il est considéré comme un texte fondateur et reste une référence pour toute une génération d’intellectuels qui analysent le sionisme comme une idéologie européenne à caractère orientaliste et colonial, orchestrant l’acculturation, la sécularisation et la destruction des références identitaires des Arabes juifs. Les intellectuels de cette mouvance, tout en insistant sur le désastre social et culturel que fut la « sionisation » des Arabes juifs, pensent leur propre histoire en rapport avec les autres victimes du sionisme, les Palestiniens.

« Jusqu’à présent, le discours critique alternatif sur Israël et le sionisme s’est essentiellement concentré sur le conflit israélo-palestinien, considérant Israël comme un État constitué allié au bloc occidental contre le bloc oriental, et dont la fondation même reposait sur la négation de l’Orient et des droits légitimes du peuple palestinien. Je voudrais ici élargir le débat et dépasser ces anciennes dichotomies (Orient contre Occident, Arabes contre Juifs, Palestiniens contre Israéliens) pour aborder un aspect que toutes les formulations précédentes ont éludé : la présence d’une entité médiatrice, à savoir les Juifs orientaux, également appelés misrahim, originaires dans leur grande majorité de pays arabes et musulmans. Une analyse plus complète doit, comme je m’efforcerai de le montrer, prendre en compte les effets négatifs du sionisme pour le peuple palestinien, et pour les misrahim qui représentent aujourd’hui la majorité de la population juive en Israël. De fait, le sionisme prétend parler au nom de la Palestine et du peuple palestinien, lui confisquant du même coup toute capacité de représentation indépendante, et il se veut en outre le porte-parole des Juifs orientaux. Or, en niant l’Orient arabe, musulman et palestinien, le sionisme a nié les Juifs “misrahim” (littéralement, “ceux d’Orient”) qui, tout comme les Palestiniens, ont eux aussi été spoliés de leur droit à la représentation - à travers des mécanismes certes plus subtils et moins franchement barbares. La voix dominante d’Israël, dans le pays même et sur la scène internationale, a presque toujours été celle des Juifs européens, les ashkénazes, tandis que celle des misrahim a été largement étouffée, voire réduite au silence. »