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Mais comment font-ils ?

Rroms : les départs ANAEM, une drôle d’histoire...

mercredi 4 juin 2008, par Anne Sara Le Cardiet

Ce témoignage de Anne Sara Le Cardiet est publié sur le beau site Solidarité Rroms Saint-Etienne : http://solidariterroms.mi-blog.net
A lire aussi à la même adresse celui de Marie-Pierre Vincent.
Et musique !


Saint Etienne, Mardi 3 juin 2008, 5h15.
Marie Pierre et moi arrivons au squat de Montplaisir, curieuses de savoir qui part avec l’ANAEM (pourquoi ils partent ? on s’en doute un peu).
Doucement, un groupe de personnes se forme à l’entrée du squat. Certains, habillés spécialement pour l’occasion, traînent d’énormes sacs sur le trottoir, tandis que d’autres, venus en France pour quelques jours seulement, n’ont aucun bagage. Tous se préparent tranquillement, l’ambiance est plutôt détendue.

Aujourd’hui, environs 40 personnes partent avec l’ANAEM. Le bus devrait être arrivé depuis 5h... mais ce n’est que vers 6h que Madame ANAEM («  je fais mon travail, je suis payée mais surtout je ne réfléchis pas à ce que je fais  ») arrive pour organiser tout cela. (Peut-être recevra t-elle une prime de rentabilité ? Après tout, ce serait normal, c’est bien grâce à elle, entre autres, que certains pourront se vanter d’être parvenu à leurs quotas...Et puis, ce n’est quand même pas simple, quand on ne parle ni le roumain ni le tsigane, de convaincre autant de personnes (certaines ne comprenant pas un mot de français) de partir avec l’ANAEM,).

Pour ce départ, certains sont venus de Clermont, d’Espagne, et même de Roumanie... pour repartir en Roumanie... et toucher 300 euros. Bon, un peu moins, car il était convenu qu’un transport soit organisé jusqu’à Timisoara (grande ville de la région dont majorité des partants sont originaires). Finalement, tous apprennent ce matin là que leur transport s’arrêtera à Bucarest... Chacun devra donc utiliser une partie de la somme qui lui sera remise pour payer le bus jusqu’à son village, mais bon, comme dit Madame ANAEM « après tout, on leur donne de l’argent !  ».

Le plus étonnant ce matin, ce n’est pas que madame ANAEM n’ait pas changé, mais bien cette scène assez terrible qui se déroule devant nos yeux : la majorité des personnes qui partent ont le sourire. La plupart d’entre elles, je ne les connais pas. Nombreux sont venus spécialement pour repartir, et bien sûr se ravient de pouvoir rentrer en Roumanie aux frais de la France, et en plus de recevoir à leur arrivée plus, que ce qu’ils n’auraient gagné en travaillant 1 mois en Roumanie.

Lors du premier départ organisé par l’ANAEM en septembre, tous partaient découragés, certains même en pleurs, contraints d’accepter cette proposition malhonnête que leur faisait la France, après les avoir inondés d’OQTF et de pressions policières.

Hier, ce que j’ai vu, finalement, ce sont des gens incroyables, qui n’ont tellement rien d’autre à quoi se raccrocher que leur famille, qu’ils acceptent tout ce qu’on leur propose, et s’adaptent avec le sourire à cette solution qui n’en est pas une. Comment font-ils ?
Si ça, ce n’est pas une richesse !

Il était plus de 7h lorsqu’ils sont montés dans le bus, pour un nouveau départ ??? Direction Lyon St- Exupéry, puis vol vers Bucarest.
Au sujet de l’ANAEM, je ne sais pas comment est financée l’ANAEM, mais...
Il est quand même assez contradictoire de voir tout cet argent mal utilisé, et en même temps, des étrangers qui sont en difficultés pour travailler en France avec un contrat en règle, souvent parce que les employeurs refusent de régler la taxe due à l’ANAEM (qui vaut presque les ¾ du salaire net perçu par le salarié).

Un exemple de l’absurdité de ce système : dans le bus de l’ANAEM, un jeune déjà expulsé plusieurs fois via des passages en centre de rétention, qui, en France, travaille assez régulièrement au noir ou vend le journal « sans abris ». Tout l’argent dépensé par la France pour être sûre qu’il dégage (frais en centre de rétention administrative, frais de transport et de personnel multipliés par autant de voyages qu’il a fait...) n’aurait-il pas pu être utilisé pour un accompagnement pour une recherche d’emploi, par exemple ?
Il faut savoir que cette situation n’est pas un cas isolé.