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Des alternatives aux pesticides existent, il faut arrêter de les interdire !

120 personnes ont participé à l’action civique en faveur des "pnpp" à Maclas ce samedi 14 mai

jeudi 19 mai 2011

Samedi 14 mai, il a plu un peu sur le massif du Pilat. Tant mieux ! Surtout que ça n’a pas découragé nombre de celles et ceux qui avaient décidé de venir à cette “action civique” pour les “PNPP” (voir)...

Les "pnpp”, “préparations naturelles peu préoccupantes", ça vous dit quelque chose ?
Ce nom un peu barbare a été adopté quand même par leurs utilisateurs parce que c’est lui qui apparaît dans des textes de loi, et que l’administration et les milieux officiels de l’agriculture et de l’agro-chimie l’utilisent pour désigner tout un ensemble de préparations utilisées pour prévenir ou traiter des maladies des plantes, et aussi comme engrais naturels.
Ces produits sont utilisés depuis des décennies ou même des siècles. Leur symbole le plus connu est sans doute le purin d’ortie. Mais il y a aussi bien d’autres tisanes, extraits, infusions et décoctions...
Est-ce que ça marche ? Oui : la preuve en est que des paysans, notamment des arboriculteurs et des maraîchers - qui n’utilisent pas de pesticides - utilisent ces préparations, ainsi que cuivre, soufre, bouillie sulfocalcique, algues, confusion sexuelle... et produisent de beaux fruits et légumes. Ces produits n’ont donc pas usurpé leur qualificatif de "peu préoccupants". Rien à voir avec le glyphosate par exemple. D’ailleurs c’est vrai qu’on ne meurt pas de boire ces tisanes. Alors qu’en Inde, les paysans ruinés par les multinationales des semences, des OGM et des pesticides boivent les produits chimiques de traitement pour se suicider...

Alors quel est le problème avec ces produits ? C’est qu’ils ne coûtent pas cher. Et qu’ils ne sont pas vendus par les grandes firmes de l’agro-chimie, dont ils risquent donc de faire baisser les profits, si l’usage s’en répandait, dans un moment où beaucoup de monde réfléchit à réduire l’utilisation des pesticides.
Et c’est pour ça que les utilisateurs de ces produits naturels risquent gros, car ces produits ne disposent pas d’une "autorisation de mise sur le marché" (la procédure, très coûteuse, utilisée pour les pesticides).

En 2008, le SRPV-Service Régional de Protection des Végétaux, particulièrement inefficace et soumis concernant le contrôle des maïs OGM disséminés en rhône-alpes en 2007, a débarqué chez Jean-Luc Juthier pour lui demander sous menace d’une énorme amende et peine de prison, d’arrêter d’utiliser ces produits naturels.
Le tarif pour les contrevenants est de 2 ans de prison et 75 000 euros d’amende...

Samedi 14 mai, à Maclas, au GAEC aux mille fruits - 12 hectares de vergers, chez Véronique, Jean-Luc et Romain Juthier, un lieu où l’on sait ce que veut dire biodiversité, production de fruits sains, respect de la nature - plus de 120 personnes se sont retrouvées pour exiger le changement de la réglementation et l’autorisation de la production, de la vente et de l’utilisation de ces "pnpp".

Cette rencontre a d’abord permis de faire le point sur la question.



D’abord avec le témoignage de Jean SABENCH, chargé du dossier des pesticides à la Confédération Paysanne. Beaucoup de paysans ont recours à la phytothérapie : tisanes de plantes, purins d’ortie etc... Mais ces produits étant classés aujourd’hui en produits phyto-pharmaceutiques (et traités comme les pesticides), ils ont besoin d’une AMM-"Autorisation de mise sur le marché". Ce qui est impossible à obtenir (en plus de pas justifié). Jean Sabench demande donc la création d’une autre catégorie de classement de ces produits, les autorisant, et simplifiant leur utilisation.

Jean-François LYPHOUT, président de l’ASPRO-pnpp (ASsociation pour la PROmotion des Produits Naturels Peu Préoccupants - Voir http://www.aspro-pnpp.org) a rappelé que l’action pour l’autorisation des pnpp dure depuis maintenant 5 ans. L’association ASPRO-pnpp, qui a eu le renfort ce samedi de pas mal de nouveaux adhérents, regroupe maintenant des adhérents individuels, des associations, des entreprises, des collectivités locales.
L’appellation "pnpp" concerne environ 400 produits, dont l’eau chaude pour désherber (eh oui, on est à ce degré dans l’absurde !), le vinaigre blanc, le savon noir contre les pucerons, etc...
JF Liphout est revenu sur la récente autorisation par le ministère de l’agriculture d’un faux purin d’ortie, en réalité une "piquette d’ortie", baptisée mensongèrement purin d’ortie. Cette préparation dont la recette (imposée) n’a rien à voir avec celle du purin d’ortie a été créée uniquement pour des raisons d’affichage politique, de communication, pour faire croire que le gouvernement autorise enfin le purin d’ortie, alors qu’il continue ce faisant à interdire la production et la vente du vrai purin d’ortie. Bref, une décision d’opportunité politique, pour lâcher du lest devant la mobilisation pour le purin d’ortie, tout en continuant à interdire le vrai purin d’ortie.
Car cet arrêté du 28 avril 2011 (annoncé en 2009 !) met les producteurs de vrai purin d’ortie hors la loi (et toujours passibles de 2 ans de prison et 75 000 euros d’amende !)

Tout ceci est tellement grossier et absurde qu’on pourrait en rire. Sauf que cela vise à empêcher le développement des alternatives aux pesticides. Et toute recherche des utilisateurs dans ce domaine, alors que l’INRA vient prêter main forte à la multinationale Syngenta (coût du programme : 2,6 millions d’euros !) pour trouver des produits ("naturels" mais à breveter) pour la pomme de terre et la vigne...
On apprend aussi que 74 dérogations viennent d’être accordées en 2010 en Europe pour des produits pesticides interdits, mais dont la vente est donc prolongée !

Au niveau européen, il existe bien une liste pour les “pnpp”. Mais les producteurs ne peuvent y accéder : l’inscription est trop chère. Alors la demande est qu’il en soit en France comme il en est en Espagne : qu’il y ait une liste toute simple sur laquelle ces préparations pourront être inscrites, et autorisées à la production, à la vente et à l’utilisation.
Il n’y aurait qu’un seul perdant : le chiffre d’affaires des fabricants de pesticides.

Dominique PUECHLONG-RUCKLY, productrice de PNPP, a témoigné elle aussi. Pour elle, la question est de savoir si l’on veut oui ou non sortir des pesticides de synthèse...

Des élus étaient présents, dont Sophie Tricot, maire de Burdignes, Olivier Keller, conseiller régional Rhônes-Alpes, président de la commission du développement rural et de l’agriculture. Le Parc du Pilat était représenté lui aussi et pourrait prochainement adhérer à l’ASPRO-pnpp comme 3 autres parcs naturels viennent de le faire.



Des produit de traitement qui se boivent en apéritif...

Après toutes ces discussions, place aux travaux pratiques, dans le verger de jeunes pommiers tout proche.
Une préparation de thym + serpollet + sarriette + origan a été épandue. Pas besoin de masque ni de combinaison de cosmonaute pour protéger Jean-Luc Juthier installé sur le tracteur, ni tous les présents dans le verger.
Le produit épandu est si peu préoccupant pour la santé qu’on peut le boire en apéritif, et c’est ce que plusieurs dizaines de personnes ont fait, juste avant l’épandage. Attention : il est tout à fait déconseillé de tenter ça avec les pesticides de l’agrochimie...
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Après l’épandage : repas, préparé par les Faucheurs Volontaires d’OGM ! Avec un "menu de résistants" : soupe d’orties, assiettes du Pilat, et Délices des Faucheurs... Et des discussions qui se sont prolongées tout l’après-midi...

Dans le département, cette action civique venait après l’action d’épandage d"huile de neem" à St-Chamond en avril 2010. (Voir : de l’huile de neem épandue à st-chamond).
Il y aura d’autres rendez-vous...