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Gâchis dans la santé ?
La ville de St-Etienne appuie la concurrence du pôle des cliniques privées contre l’hôpital public.
Elle garantie à hauteur de 1 million d’euros un emprunt de 3 millions d’euros pour développer des activités non autorisées par l’ARH et déjà assurées par l’hôpital.
mercredi 8 septembre 2004, par
Le Maire de St-Etienne a fait voter au Conseil municipal de ce lundi 6 septembre une garantie d’emprunt de 1 million d’euros en faveur du chpl - "Centre hospitalier privé de la Loire" - , qui est en fait le pôle des cliniques privées en cours d’installation à Montchovet sur le terrain de l’ex-Muraille de chine.
Cette délibération avait déjà été proposée au conseil municipal du 7 juin, mais retirée in extrémis quelques heures avant le vote suite à un certain nombre d’objections que j’avais relayées au cours de la discussion préparatoire au conseil.
Cette fois-ci, alors qu’en fait rien n’a changé, la municipalité a décidé de passer outre ces arguments.
La délibération présentée est la même, sauf que le texte est plus vague, et ne dit pas explicitement qu’il s’agit du financement directes de certaines activités :
7 juin 2004 : "La SARL Immobilière CHPL (...) envisage des travaux supplémentaires sur des missions diverses comme la réanimation, la cardiologie interventionnelle, les urgences, l’extension de l’unité de néonatologie qui passerait de 7 à 12 berceaux et la création de lits supplémentaires en médecine pour accueillir les personnes âgées avec une mise en oeuvre de tout un programme autour de la gériatrie" ...
6 septembre 2004 : "Afin d’anticiper le développement de ses activités, la SARL Immobilière CHPL (...) prévoit des travaux supplémentaires".
Le projet est bien évidemment le même, les sommes restent les mêmes, mais la nature des travaux est cette fois masquée sous l’apparence d’un investissement immobilier, alors qu’il s’agit (pour un coût total de 3 millions d’euros - environ 20 millions de F - dont un million garanti par la ville) des mêmes activités.
Et c’est bien ce qui fait problème. Car la création de ces activités semble n’obéir à aucune logique médicale. Elles ne bénéficient d’ailleurs pas d’autorisation de l’ARH - l’Agence Régionale de l’Hospitalisation, liée au Ministère de la santé, même si le CHPL va faire le forcing pour l’obtenir.
Pas d’autorisation pour une raison simple : ces activités, en particulier la réanimation et la cardiologie interventionnelle sont aujourd’hui assurées par le CHU de St-Etienne, notamment à l’Hôpital Nord, où elles ne buttent que sur l’insuffisance de moyens.
La création de ces mêmes activités dans le pôle des cliniques privées relève donc d’une démarche de concurrence directe avec des activités déjà assurées par le CHU, et pas du tout d’une recherche de coopération et de complémentarité.
C’est du gâchis de moyens financiers.
Ceci est d’autant plus étonnant qu’au printemps dernier ont circulé, venant de l’ARH, deux hypothèses concernant les activités de réanimation dans le "secteur sanitaire 6" (St-Etienne, Roanne, Annonay...), activités de réanimation qui sont la clé du développement possible des autres activités envisagées par le CHPL.
La 1ère hypothèse prévoyait le maintien du nombre actuel de lits de réanimation dans le public, et la création d’un certain nombre de lits dans le privé (CHPL ?). Mais la 2ème hypothèse prévoyait une diminution du nombre de lits de réanimation dans le public (CHU notamment), et un transfert vers le privé. Ce qui a provoqué une réaction vive dans les milieux hospitaliers concernés.
Pourquoi ce forcing du CHPL ? Cette concurrence n’aurait jamais vu le jour sans le changement progressif en cours du système de tarification des soins hospitaliers, avec le passage du "budget global" à la "tarification à l’acte". Cette "tarification à l’acte" va rendre très lucratives ces activités.
Donc, si le CHPL réussit dans son forcing et obtient de l’ARH, grâce à des appuis politiques, l’autorisation de développer ces activités, ce sera financièrement très intéressant pour les cliniques privées. Mais globalement, ce sera du gâchis, et c’est pourquoi des personnes s’en sont émues dans les milieux médicaux.
Contrairement aux justifications utilisées par le Maire de St-Etienne, qui invoque dans cette affaire une démarche de complémentarité entre les trois pôles de santé que sont le CHRU, les cliniques mutualistes et les cliniques privées, cette opération n’a rien à voir avec la démarche qui a prévalu par exemple pour l’Institut de Cancérologie de la Loire, fruit d’une coopération entre le CHU et les cliniques mutualistes. Là, il s’agit d’une coopération, et d’un co-financement, pour un projet commun. Non d’une concurrence d’installations de santé. Rien à voir non plus avec l’IRM (le Scanner du Forez, installé cours Fauriel) dont le CHU, les cliniques mutualistes et les cliniques privées se partagent les plages d’utilisation, et le financement en proportion de cette utilisation.
La façon de procéder du CHPL : le lancement de ces activités alors même que l’ARH ne les a pas autorisées, et que le SROS (Schéma régional d’organisation de la santé, qui sera revu en 2005), ne les prévoit pas pour le moment, relève d’une démarche de passage en force en mobilisant des appuis politiques.
Il est grave et regrettable que la ville de St-Etienne apporte son appui à ce forcing et à cette mise en concurrence d’équipements de soins alors qu’il y a tant à faire pour développer des activités manquantes ou dotées de moyens insuffisants.
La ville prend d’ailleurs ce faisant un risque financier important. Car elle a déjà garanti des investissements pour le CHPL, et cette fois-ci encore l’engagement est lourd : "article 5 : Au cas où le demandeur, pour quelque motif que ce soit, ne s’acquitterait pas des sommes devenues exigibles ou des intérêts moratoires qu’il aurait encourus, la Ville s’engage à en effectuer le paiement en ses lieu et place sur simple demande de l’organisme prêteur adressée par lettre recommandée avec accusé de réception, sans jamais pouvoir opposer le défaut de mise en recouvrement des impôts dont la création est prévue ci-dessous, ni exiger que cette caisse discute, au préalable, avec l’organisme défaillant".
A noter que la création de ces activités au CHPL ne concurrence pas seulement les activités du CHU mais aussi celles, en réanimation par exemple, des Hôpitaux publics de Firminy et de St-Chamond par exemple.
C’est donc une décision qui est un pur choix politique. Un choix "libéral".
Aux arguments portant sur la concurrence et le gâchis de moyens, le Maire refuse de répondre : "on est dans une logique d’offre de santé, et c’est le ministère et son agence l’ARH qui décide et qui choisit, pas nous, la ville. Je ne veux pas entrer dans ce débat". Cette prétendue "neutralité" n’est pas recevable. D’autant que le Maire de St-Etienne est en même temps... le Président du Conseil d’Administration du CHRU ! A ce titre, il est directement concerné et impliqué par les conséquences des décisions prises dans le domaine de la santé.
Il apparaît aussi que ce choix en faveur des cliniques privées est lié à une "dette" de la municipalité à ces cliniques privées qui ont accepté moyennant soutien de s’installer à Montchovet ("un établissement courageux" a dit le Maire).
Le tout se prépare quoi qu’il en soit aux dépends d’une logique médicale de meilleurs soins pour tous, d’une logique d’utilisation rationnelle des moyens pour développer les équipements de santé. Et en faveur d’une logique financière offrant des activités lucratives pour le CHPL, une logique marchande et capitaliste, si on veut utiliser les mots appropriés à ce qui risque de se passer.
Tout cela mérite une vraie discussion entre toutes celles et tous ceux qui sont concernées par la santé. Et cela regarde l’ensemble des citoyens.
Roger Dubien
Conseiller municipal de St-Etienne
Messages
1. > La ville de St-Etienne appuie la concurrence du pôle des cliniques privées contre l’hôpital public., 15 septembre 2004, 09:56, par Syndicat cgt hopital de FIRMINY
merci de cet article , nous allons l’utiliser politiquement lors de notre visite à D. Cinieri qui se dit le sauveur de l’hopital de Firminy et qui appartient pourtant au même parti que le maire de st etienne merci encore et bravo
gisèle arsac et le syndicat CGT hopital de FIRMINY
2. > La ville de St-Etienne appuie la concurrence du pôle des cliniques privées contre l’hôpital public., 15 septembre 2004, 13:39
Cette décision de la municipalité d’ appuyer le centre privé vient confirmer les inquiètudes déja exprimées par SUD duCHU au sujet de la tarification à l’acte et de la réforme hopital 2007 qui vise à marchandiser la santé.
Jeudi 16 nous nous réunissons, je vous tiendrai informer des actions prévues afin d’alerter la population.
Florent Roman
responsable SUD Sante au CHU
3. décision prise à l’ARH ?, 23 septembre 2004, 13:11, par Roger Dubien
Selon certaines informations, l’ARH (Agence Régionale de l’Hospitalisation) aurait accordé 6 lits de réanimation au CHPL.
Par contre, l’émotion suscitée par cette affaire amènerait les responsables politiques qui la portent (parce qu’il s’agit avant tout d’une démarche politique en faveur du "libéralisme" dans le secteur de la santé) à ne pas supprimer de lits de réanimation dans le secteur public. Bien que la question ne soit pas réglée pour l’Hôpital de St-Chamond, qui pourrait encore perdre 6 lits.
Mais pour qu’il n’y ait pas de vagues, il pourrait peut-être les garder.
Dans les milieux hospitaliers publics, le désaccord est important avec cette création de lits de réanimation dans le pôle des cliniques privées. Parce que chacun voit bien où certains veulent en venir...
Mais s’il n’y a pas de suppressions dans le public, le désaccord reste latent.
Par contre, il y a une nette opposition à la suppression de lits dans le public au sein du milieu médical stéphanois.
4. > La ville de St-Etienne appuie la concurrence du pôle des cliniques privées contre l’hôpital public., 15 octobre 2004, 06:52, par Cyrille Bonnefoy
message 14 Oct 2004
"(...) Bravo pour l’information sur le devenir des hôpitaux publics et les choix de financement de Thiollière en faveur de la clinique privée à but lucratif.
Actuellement les travaux des experts de l’ARH (Agence Régionale Hospitalière) et les préconisations de l’ARH concernant les lits de Réanimation du secteur Loire Sud iraient vers :
pour le secteur Public :
de 8 lits à 6 lits pour l’hôpital de Firminy (soit la perte de 2 lits de Réanimation)
de 8 à 6 lits pour la Réanimation de Montbrison (Soit la perte de 2 lits)
La perte de tout le secteur de Réanimation de St-Chamond (soit 6 lits au total) soit un différentiel au total de 10 lits en défaveur des lits de réanimation publique sur le secteur Loire Sud.
Parallèlement 8 lits de réanimation sont offerts au secteur Privé à but lucratif de la muraille de Chine... A travers ces choix nous pouvons observer les priorités sanitaires de notre ARH.
Quand le secteur de réanimation est menacé dans un hopital de proximité c’est la toiture de la structure qui est en danger et quand celle-ci s’effondre ce qui semble être le cas de l’hôpital de St-Chamond c’est tout l’hôpital qui est menacé.
En effet dans la question du label de Réanimation c’est le nombre de réanimateurs qui est posée : quand un service est labellisé il y a nécessité de mettre en place la double garde d’anesthésiste et réanimateur, ce qui rend in facto les postes attractifs (en effet aujourd’hui la situation démographique médicale est alarmante : nombre de postes dans la Loire ne sont pas occupés sur ce secteur).
Je rappelle également que le Médecin réanimateur intervient dans les Blocs opératoires, dans les maternités (péridurale), dans les urgences, dans les services de Chirurgie dans les visites pré-opératoire... Or si dans un hôpital donné il n’y a pas suffisamment de médecins les patients ne sont pas dans une situation sécurisée, les Médecins font le choix de la qualité de vie en allant exercer dans d’autres structures plus dotées en nombre... et les patients préfèrent choisir, quand cela est possible, d’être suivis dans des structures présentant toutes les qualités de plateau technique et de moyens humains suffisants.
En bref les dangers à plus long terme, avec la disparition des lits de réanimation sont :
la diminution de l’offre de soins publique sur Loire Sud et bien au delà, car cette logique exprimée ici est employée à l’identique ailleurs.
l’ouverture de prérogatives toujours plus importantes pour le secteur privé à but lucratif
la disparition à terme de différents secteurs comme la Maternité, certains services de chirurgie de proximité, de pédiatrie, des services d’urgence etc...
Excusez-moi pour ce mot un petit peu brouillon mais je pense que ce qui est écrit là n’est pas un scénario catastrophe, mais est une déclinaison locale des projets pensés, impulsés par l’AGCS.
cyrille.bonnefoy@wanadoo.fr