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St-Etienne : 40 enfants à la rue, jusqu’à quand ?

lundi 15 décembre 2014

Ils sont une quarantaine de mômes, de 1 an à 15 ans ; depuis mercredi soir 10 décembre, ils dorment la nuit dans des conditions sommaires - mais au chaud maintenant - dans le gymnase de La Rivière que la Préfète de la Loire a été obligée de réquisitionner suite aux mobilisations solidaires (1). Sur le visage de plusieurs de ces enfants se voient les stigmates courantes chez les personnes qui vivent dans la rue. Ces blessures là sur des visages d’enfants dans une ville qui compte des milliers de logements vides ont de quoi faire hurler. Plusieurs de ces mômes toussent, parce qu’il a fait froid et humide, au cours des semaines précédentes, même si le temps est provisoirement plus clément.
ça se passe en France, à St-Etienne, à la veille de Noël 2014. Ces enfants chassés pour la x-ième fois avec leurs familles d’un taudis ont traîné pendant des semaines dans les rues de St-Etienne, harcelés par des contrôles policiers les obligeant à se lever et à partir plus loin...

Cette ouverture d’un gymnase, entre 20h et 7h30, est un premier acquis. Mais les conditions sont sommaires. Des lits de camp. Pas de douche. Pas possibilité de cuisiner pour manger. La nuit, difficultés pour se rendre aux toilettes.
Et puis lever à 6h30, et tout le monde dehors à 7h30, à errer dans les rues.
Il y a un "accueil de jour" à Renaître, près de Chateaucreux, pour les personnes à la rue. Mais ce n’est ouvert en semaine que de 8h30 à 12h, le samedi de 9h30 à 12h et le dimanche de 9h30 à 12h et de 14h à 16h. Alors, où se faire à manger ? Et que faire entre 12h et 20h ? Errer. En plus, les toilettes et les douches sont indisponibles ou en travaux, et il n’y a que 2 plaques chauffantes en tout et pour tout. Et puis Renaître peut accueillir 50 personnes, et quand les familles du gymnase de La Rivière arrivent, 30 places sont déjà occupées par d’autres sans logement.
Tout cela, les militants du collectif "Personne à la rue" et de "Solidarité Rroms" sont allés le constater de leurs propres yeux.


A 7h30, tout le monde à la rue ? Avec une distribution d’un petit déjeuner aux enfants par des militants solidaires...


Alors tous les matins depuis le jeudi 11 décembre, 20 à 30 personnes des 2 collectifs se retrouvent à partir de 7h au gymnase de la Rivière.
Un petit déjeuner est offert aux enfants, devant l’entrée.
Et puis demande est réaffirmée que le gymnase soit ouvert dans la journée (mis à part un moment nécessaire pour le nettoyage) pour que les familles ne soient pas condamnées à errer dans la ville, et qu’un aménagement permette de cuisiner quelque part.
Côté Préfecture, Renaître et DDCS (direction départementale de la cohésion sociale), pas de réponse.

Alors samedi matin, les militants présents sont entrés dans le hall du gymnase. Il a fallu pousser un peu parce que des vigiles s’y opposaient. Au bout de quelques minutes, arrivée d’une dizaine de policiers. Impossible de trouver un interlocuteur à la Préfecture (apparemment le WE, la permanence est à Lyon !). Finalement l’arrivée d’un capitaine de police très professionnel a permis de se mettre d’accord sur la possibilité pour les familles de rester jusqu’à 11h, et de renouveler la demande d’entrevue à la Préfecture et à la DDCS.
Avant d’en arriver là, on a pu entendre de la part de quelques uns (seulement) des policiers des réflexions qui posent question sur le contenu républicain de la formation qui leur est faite. D’abord : "Prenez-les chez vous !". ça a déjà beaucoup été fait, monsieur... Mais aussi mise en cause des militants associatifs : "on ne peut pas aider toute la misère du monde", "vous allez créer un appel d’air, il y en aura de plus en plus", "il n’y a pas de travail", "ils ne veulent pas travailler", "ils prennent le travail des autres", "la France n’a plus d’argent, on ne peut pas, les charges des entreprises sont déjà insupportables" ! "on paie déjà trop d’impôts" !! "heureusement qu’il y a des riches" !!!... Bref, une argumentation très politique, qui ne fait que répéter, c’est vrai, ce que martèlent la préfète et l’ancien et le nouveau maire de St-Etienne, pour justifier que des enfants vivent à la rue...
Toujours est-il que samedi, familles et enfants ont eu un sursis au chaud jusqu’à 11h.
Et l’après-midi a eu lieu une fête pour les enfants au local de Solidarité Rroms.

Dimanche matin, équipe renforcée de vigiles et de personnel de Renaître, pour empêcher de rentrer. Apparemment tout le monde avait été brieffé. Et le syndrome du Pont de la rivière Kwaï a frappé à nouveau : des gens défendent l’injustice comme si c’était vital pour eux-mêmes, perdant de vue ce qu’ils sont en train de faire, de défendre, parce que "c’est leur boulot". Et c’est probable qu’à certains il a été dit : c’est ça ou la porte...

Lundi matin, ça recommence. Mais cette fois, 40 personnes sont là et tout le monde rentre et la distribution des petits-déjeuners se fait dedans. D’autre part, les choses s’organisent pour que les enfants concernés puissent aller bientôt dans les écoles du quartier.

Ce mercredi 17 décembre à 17h aura lieu à la Bourse du Travail (salle 66) une réunion des associations et militants qui participent au collectif "Pour que personne ne dorme à la rue". Pour faire le point de la situation (et pas seulement de celles des familles du gymnase de La Rivière), et décider de nouvelles actions...

A suivre.

(1) le gymnase est géré par Renaître. Une "association" bien peu associative. C’est la Préfecture qui finance, et apparemment, c’est la Préfecture qui ordonne. C’est tout dire. Tchao la déontologie, et la charte du travail social de l’ANAS. Les travailleurs sociaux ont le choix entre obéir ou partir ?

 Dernière minute  
Une réunion a eu lieu ce lundi après-midi en préfecture, avec le Directeur de cabinet, la directrice adjointe de la DDCS et la présidente de Renaître.
Un petit déjeuner sera proposé aux familles le matin, et un repas le soir. Par Renaître en semaine et par la Croix-Rouge le WE.
La Croix-Rouge est également chargée d’un travail de suivi santé.
Pour ce qui est de l’amplitude horaire d’ouverture du gymnase, une décision sera annoncée en fin de semaine.


Samedi 13 décembre, fête organisée par Solidarité Rroms pour les enfants du gymnase